C’est bien connu : militairement, le renseignement est l’une des clefs majeures de la victoire ; sans lui, il est vain d’espérer vaincre. Et ce n’est pas au colonel Pierre-Alain Antoine que nous l’apprendrons. Le renseignement… mais également son pendant « l’intox », la mystification, ainsi que nous le verrons dans ce livre attrayant sous bien des aspects;
Quarante-et-un chapitres, tous aussi captivants les uns que les autres, se succèdent dans ce livre de façon chronologique. Après un prologue où l’auteur rappelle que cet ouvrage évoque bien des faits de guerre, à l’exclusion de recherches de renseignements en temps de paix. Le livre démarre très fort, avec un modèle de bataille où le renseignement et la ruse firent toute la différence : Hastings, 1066. Oulà ! Mais cela nous éloigne fort de l’aviation, tout cela ! Pas d’affolement : dès le cinquième chapitre, on voit apparaître Taube et Zeppelin pour le rocambolesque projet d’un « faux Paris » destiné à tromper l’aviation allemande. Les chapitres sont relativement courts — six pages en moyenne — et sont menés tambour battant (ce qui est logique en période de guerre). Les sujets évoqués ne sont pas exclusivement « aéro », mais ces derniers sont tout de même majoritaires : Pierre-Alain Antoine est tout de même un ancien pilote de l’armée de l’Air ! Le gros de l’ouvrage se déroule pendant la Seconde Guerre mondiale, mais nous avons droit à quelques épisodes de la Guerre froide ainsi que de la Guerre du Vietnam.
Si quelques-uns de ces épisodes sont relativement connus, comme l’opération Fortitude, monument « d’intox », d’autres valent « leur pesant de cacahuètes », comme l’invraisemblable opération Mincemeat où les Britanniques utilisèrent un cadavre qu’ils dotèrent de faux documents avant de le confier à un courant marin. On trouvera plus loin un chapitre sur les code-talkers navajos, un autre sur l’opération Vengeance et la mort de l’amiral Yamamoto, un autre encore sur l’utilisation du GEE* par les équipages des Halifax des « Groupes Lourds…
L’intérêt du découpage en courts chapitres, qui ne manque pas d’évoquer les novels chères aux Britanniques, permet d’interrompre la lecture facilement et de la reprendre sans se perdre. Un livre passionnant, bourré d’informations intéressantes, dans lequel l’auteur partage avec nous sa curiosité pour un aspect guerrier souvent méconnu… et néanmoins attrayant.
Notons avec plaisir les menus détails qui participent au plaisir de consulter un livre : les notes sont bien à leur place en bas de page et non reléguées en fin d’ouvrage, les annexes comportent un glossaire bien utile et l’incontournable bibliographie. Si le livre est bien écrit, on notera aussi que, fidèle à son habitude, l’éditeur Gérard Louis ne se moque pas des lecteurs de ses ouvrages : le livre est imprimé en offset sur un papier mat de 135 g/m2. En clair : une impression de haute qualité sur un beau papier bien épais, permettant une reproduction fine des illustrations, une lecture commode et un toucher agréable. Au final, un ouvrage sympathique, à la fois enrichissant et distrayant.
Philippe Ballarini
– *GEE : General Electric Equipment, firme qui conçut ce système de radionavigation aérienne.
258 pages, 17 x 24 cm, couverture souple
0,350 kg