À la fin des années 90, Seiho Takizawa, mangaka connu pour ses récits historiques souvent aériens, s’attaque à l’adaptation dessinée d’un roman lui-même inspiré de la vie d’un pilote de chasse japonais entre 1943 et 1945. Il s’oriente du coup résolument vers le réalisme pour conter l’histoire de Yoshio Matsumoto, un jeune pilote doué quoique un peu brouillon qui, aux commandes d’un Kawasaki Hien, va vivre la chute progressive de l’armée japonaise, de Guadalcanal aux tentatives désespérées des kamikazes.
Comme dans ses œuvres de jeunesse, le trait et la mise en page de Takizawa font merveille. Le récit un peu dense laisse moins de place aux planches épurées et le texte est parfois légèrement trop présent, mais la gestion du rythme narratif, l’alternance entre passages dramatiques et scènes plus détendues, et l’irréprochable dynamisme du dessin rattrapent aisément cette petite faiblesse. La présence à la base d’un vrai scénario réaliste a également contraint l’auteur à renoncer aux délires poético-techniques qui parsemaient son œuvre de jeunesse Japanese interceptors 1945, même si l’on retrouve sa passion pour la technique et la pureté aéronautique dans les modifications apportées au Hien du personnage principal, visant à lui donner les meilleures performances possibles au détriment du blindage et de la sécurité.
Le récit reste dur, âpre même, les soldats japonais n’étant pas de grands sentimentaux et camouflant souvent leurs pensées propres derrière l’argument hiérarchique — et si l’on connaît parfois les émotions de Yoshio, il faut deviner les intentions de ses interlocuteurs derrière leurs actions, comme lorsque le chef d’escadrille lui donne solennellement l’autorisation d’utiliser un simple parapluie…
103e escadrille de chasse est donc très japonais, solide, agréable quoique parfois sec, et la sensibilité se dégage subtilement de l’ensemble malgré une certaine rudesse apparente. Notre principal regret concerne la qualité de la traduction, très discutable dès qu’il s’agit de termes techniques : par exemple, on apprend ici que le Ha-40 est un moteur « refroidi en ligne par liquide » — tous les mots sont là, mais pas dans le bon ordre.
Pour les amateurs de BD d’aviation, c’est en tout cas un incontournable, qui permettra de se replonger dans la guerre du Pacifique avec une approche très différente des nombreux comics parus sur le sujet.
Franck Mée
224 pages, 16 x 23,5 cm, couverture souple avec rabats
Avec l’aimable autorisation des
© Éditions Paquet
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