Il est des textes difficiles à présenter ; c’est le cas de cette “ballade poétique” de Pierre Grand’Eury.
Ici, l’auteur reprend une construction rare : l’alternance entre parties narratives et poésie, un peu à la manière du Livre de la jungle. Mais, plus encore que chez Kipling, le texte narratif — qui nous conte parallèlement un vol délicat, pas très bien préparé il faut le dire, et une rencontre en montagne — se lie étroitement aux poèmes.
L’auteur ayant été primé à plusieurs reprises par l’Académie des poètes classiques, on ne s’étonnera guère de trouver ici quelques magnifiques joyaux, particulièrement bien écrits, dans à peu près toutes les forme de poésie imaginables — on trouve notamment un bon lot de pantoums, forme poétique assez peu usitée et très contraignante dont Pierre Grand’Eury se sort avec les honneurs.
On pourra regretter ou apprécier un déséquilibre en faveur du poème — les parties narratives étant, finalement, assez réduites au regard de l’ouvrage –, mais on savourera sans aucun doute quelques très jolis passages. On appréciera en particulier cette faculté qu’a l’auteur à écrire un texte qui coule ave fluidité et qui, accessoirement, rime, là où tant de forgerons travaillent manifestement à trouver la rime quitte à massacrer la fluidité lorsque ce n’est la grammaire. On appréciera également l’élégance discrète, naïve, des illustrations de Françoise Grand’Eury.
Reste, et là, je me permets une objection toute personnelle que beaucoup sans doute ne partageront pas, que la façon dont les textes ramènent presque systématiquement à l’hypothétique dieu biblique peut hérisser les agnostiques et autres non-chrétiens. Pour ma part, si je puis apprécier la beauté de la nature, la richesse d’un texte poétique, les miracles de la vie, pourquoi chercher ailleurs * ?
Franck Mée
122 pages, 16 x 23 cm, broché
* détournement d’une citation du narrateur, p.95… en espérant qu’il ne m’en tiendra pas rigueur.