Plus que jamais dans l’histoire de l’aviation commerciale, « l’enjeu était de taille » : Airbus A380, avion de tous les superlatifs certes, mais après cinq années d’études théoriques, de calculs et simulations informatiques, il faut comme pour tout autre aéronef procéder à des essais poussés, au sol et en vol, et ainsi s’assurer de sa fiabilité et sa sûreté pour les futures compagnies aériennes. En l’occurrence, il s’agit selon le chef pilote d’essais Jacques Rosay de « ne pas se laisser griser », de « ne pas trop aimer les avions, ne rien leur pardonner. »
Ce sont quelques-uns de ces essais que présente ce magnifique film (130 min.) de Jean Froment, décomposé en cinq épisodes :
– Épisode 1 : Premiers tests à risques nous montre les essais en vol de septembre 2005, dont le risqué vol de vibrations destiné à vérifier la solidité de la structure, des essais de décrochage, un spectaculaire décollage à pleine charge et à la vitesse la plus réduite, où la queue de l’avion « talonne » la piste dans une gerbe d’étincelles, le traditionnel test de la « piscine » pour vérifier que l’avion ne part pas en aquaplaning sur une piste détrempée ;
– Épisode 2 : Cap sur la Colombie pour des essais de comportement des réacteurs Rolls-Royce dans l’air raréfié des cimes colombiennes (Medellin), ainsi qu’une escale à Pointe-à-Pitre ;
– Épisode 3 La campagne grand froid dans le Grand Nord canadien (Iqualit) par moins 30°C ;
– Épisode 4 Bienvenue au Dubaï Air Show où l’avion est admirablement présenté en vol, avec un ballet final au-dessus du Golfe Persique encadré par les Alpha Jets de la Patrouille de France ;
– Épisode 5 90 secondes pour convaincre, test d’évacuation d’urgence de 853 passagers et 20 membres d’équipage réalisé en 75 secondes au lieu des 90 minimum prescrites.
Les images sont superbement cadrées et contrastées, la voix sobre du commentateur laisse largement la parole aux acteurs eux-mêmes, et c’est précisément cette dimension humaine que nous avons beaucoup appréciée. On mesure en effet au fur et à mesure des interviews (menées « dans le feu de l’action ») toute la passion, tout l’engagement des pilotes, mécaniciens navigants, ingénieurs, mécaniciens au sol, le professionnalisme calme de tous les personnels d’Airbus concernés par la réussite de ces essais. Les meilleurs calculs informatiques ne remplacent pas toujours les expérimentations en grandeur réelle, témoin cette tuyauterie hydraulique de train d’atterrissage mal placée, cassée lors de l’essai « piscine ».
Des liens se nouent partout où l’avion passe même brièvement, suscitant un accueil admiratif et enthousiaste à Medellin comme à Iqaluit, où le directeur de l’aéroport aide en personne à décharger d’un avion des groupes électrogènes de renfort venus des États-unis. Le moins ému par la réussite de sa mission n’est d’ailleurs pas le responsable de l’essai d’évacuation, spectaculaire mais peu médiatisé (épisode 5) qui a demandé quatre années de travail.
À l’issue de ce film, même si comme moi on n’est pas a priori passionné par les avions de ligne, difficile de ne pas partager le commentaire de Pedro Diaz, coordinateur des essais en vol à Iqaluit : « On n’a plus envie de partir ! » Un DVD superbe, passionnant et émouvant, à voir et à conserver sans hésitation !
Georges-Didier Rohrbacher
1 DVD
130 minutes – format 16/9 – PAL Zone 2
Son stéréo – version française