En 2010 paraissait chez Arthaud une excellente biographie d’Amelia Earhart sous la plume de Bernard Marck. À sa parution, Corinne Micelli écrivait : « L’intérêt de ce nouvel ouvrage, dont le personnage a déjà fait l’objet de nombreuses biographies, réside très certainement dans le souci du détail, la recherche de la vérité et dans la qualité de l’écriture. Une référence remarquable et incontournable qui mérite une place de choix dans le rayon réservé aux Hommes et femmes qui ont fait l’aviation. ». Ce livre, qui s’était vu récompensé par le Prix Guynemer 2011, connaît une nouvelle vie chez Points dans une formule « poche » (épaisse tout de même de 4 cm !) à un prix singulièrement attractif. (9,90 €). Le texte étant inchangé, nous vous proposons ci-dessous notre recension de 2010.
Philippe Ballarini
– 100 pages de notes de fin, bibliographie et index onomastique
En mai 1932, Amelia Earhart traverse en solitaire l’Océan Atlantique et réalise trois mois plus tard le premier vol transcontinental sans escale. En 1935, elle est la première femme à traverser en solitaire le Pacifique de Honolulu à la Californie, à piloter un autogire, et elle s’offre des records de vitesse entre Mexico et Newark, puis entre Mexico et Washington. Reconnaissance suprême de son talent, elle est la première femme à être décorée de la très prisée Distinguished Flying Cross et à recevoir la médaille d’or de la Société nationale géographique.
Comme tout lui réussit et qu’aucun obstacle ne paraît infranchissable pour l’insatiable Amelia, elle décide de réaliser l’irréalisable : le tour du monde. Putman, qu’elle a fini par épouser sous réserve de conserver intacte sa liberté, s’active pour trouver les fonds nécessaires à l’équipée. Le 2 juillet 1937, alors qu’elle s’envole vers son avant-dernière escale, l’île de Howland où elle doit se ravitailler en carburant, le Lockheed Electra ne répond plus à la radio. Une véritable armada d’avions et de navires est mise en œuvre pour quadriller la partie du Pacifique ou le Lockheed aurait pu s’abîmer en mer. En vain. Un tribunal déclarera morte Amelia Earhart. le 5 janvier 1938. L’enquête sur les conditions de la disparition de la plus grande aviatrice américaine va durer plus d’un demi-siècle et ne sera jamais élucidée.
Jamais, à ma connaissance, je n’ai eu à lire une biographie aussi complète que celle produite par Bernard Marck.
La vie d’Amelia Earhart est passée au crible, analysée et décryptée dans ses moindres fragments. L’auteur a poussé le détail jusqu’à établir l’arbre généalogique d’une femme d’exception au destin singulier, élevée en dehors des convenances établies par une grand-mère au caractère bien trempé. Déjà, la mère d’Amelia, Amy, était parvenue à arracher au patriarche Alfred Otis, l’autorisation d’épouser un fils de révérend luthérien, une union considérée comme une mésalliance. Outre la ségrégation raciale, on ne mélangeait pas les torchons et les serviettes dans cette Amérique de la fin du XIXe siècle. Assurément, les Otis étaient tissés en lin tandis que les Earhart étaient d’une fibre dont on fait les serpillières. Toujours est-il que la progéniture, issue d’une lignée féminine au fort tempérament, ne pouvait que refuser le joug des hommes et connaître un destin hors normes.
Amelia Earhart a rejoint le martyrologe de l’aviation. En réservant une bonne centaine de pages à l’enquête qui a suivi la disparition de l’aviatrice, Bernard Marck aborde des pistes intéressantes qui « tiennent la route » tout en laissant au lecteur son libre arbitre sur les raisons de la mort de « Lady Lindy » devenue « Miss Lady » après son mariage avec Putman. Panne de radio, météo exécrable, ou victime sacrifiée d’un conflit larvé entre les États-Unis et le Japon ? Le lecteur a le choix. Quoi qu’il en soit, le mystère plane toujours.
L’intérêt de ce nouvel ouvrage, dont le personnage a déjà fait l’objet de nombreuses biographies, réside très certainement dans le souci du détail, la recherche de la vérité et dans la qualité de l’écriture. Une référence remarquable et incontournable qui mérite une place de choix dans le rayon réservé aux Hommes et femmes qui ont fait l’aviation.
Corinne Micelli
– Édition 2010 : 648 pages, 15,2 x 24 cm, couverture souple
– Édition 2021 : 896 pages, 10,8 x 17,9 cm, broché
Prix Guynemer 2011