« Entre nous, vous voyez-vous avec un ordinateur portable en guise de livre de chevet ? »
Qu’elle est jolie, cette maxime qui fut en exergue de l’Aérobibliothèque ; et combien je suis, pour une fois, désolé d’avoir eu à lui faire affront !
C’est en effet une particularité du livre, enfin devrais-je dire de l’objet rédactionnel, qui nous intéresse aujourd’hui. Il est proposé en deux versions : un traditionnel livre « à l’ancienne », ceux que nous aimons quand on peut en sentir l’odeur du papier et en écouter le bruit des pages que l’on tourne d’un doigt curieux, parfois blasé mais souvent gourmand quand le sujet est passionnant, et une version téléchargeable en pdf, celle qui… euh… bon, celle qui n’encombrera pas nos étagères puisqu’il faut bien lui trouver un avantage.
Certes un autre intérêt est le prix : vous économiserez 6,45€ si vous succombez au chant des sirènes numériques. C’est, vous le comprendrez à lire la suite, à mon avis une économie de bout de chandelles qui chez moi a mis le feu aux poudres…
La plupart des éditeurs n’auraient pas l’idée de fournir en service de presse la version « virtuelle » pour une recension. Cette fois-ci, oubli, erreur, négligence, que sais-je, ce fut le cas avec les éditions Harmattan, qui pourtant n’hésitent pas d’ordinaire à nous démontrer la qualité de leurs publications imprimées. Ou alors était-ce pour nous montrer les différents aspects de l’édition d’aujourd’hui, pour ne pas nous laisser sombrer dans les sables mouvants de notre conservatisme jusqu’au-bou(quin)tiste ? Pour nous injecter une once de modernisme, une dose de jeunisme ? Lire la NDLR
Résultat des courses ? Je n’aime pas ! Je ne parle pas du contenu de l’ouvrage lui-même, sur lequel il ne faudra pas que j’oublie de revenir tout de même. Je parle uniquement de ce support numérique en pdf (plus de feuilles ?) au travers duquel j’ai dû découvrir le livre, comme j’avais promis de le faire.
Je n’ai pas aimé me sentir plus moderne ou plus jeune par l’utilisation de supports virtuels. C’est de sentir le poids du livre dans mes mains qui est mon bain de jouvence. C’est le jeu avec les mots sur la page qui entretient ma vue, pas leur matraquage électronique par les lignes d’un écran cathodique.
Je n’ai pas aimé jouer de l’index sur la molette de ma souris pour le consoler de ne pas avoir de pages à tourner. Je n’ai pas aimé mettre un signet pour me rappeler où j’en étais entre deux séances de lecture, plutôt que le marque-page fétiche que j’utilise d’ordinaire et qui est resté à se morfondre dans un coin en attendant de plus saines lectures dont il aurait à nouveau à marquer le rythme. Je n’ai pas aimé chercher du regard le livre sur mes étagères et ne pas le trouver, au point d’hésiter à lancer l’impression des 228 pages, histoire d’apporter tout de même à mes bibliothèques la surcharge à laquelle elles se sont habituées. Je n’ai pas aimé me sentir l’acteur d’une espèce de Fahrenheit 451 « new-age », où les livres seraient désormais interdits sous leur forme ligneuse, où le papier serait brûlé dans un autodafé géant à la gloire du « tout numérique ».
Non, décidément, je n’ai pas aimé cette semaine avoir un ordinateur portable en guise de livre de chevet !
Jean-Noël Violette
PS : Ah oui ! Le livre…
Eh bien lui, malgré tout, je l’ai apprécié quand même. C’est une pure autobiographie, écrite avec beaucoup de modestie par un des grands noms du vol à voile de cette charnière des siècles. On y croise d’autres noms prestigieux, et on y retrouve ce que beaucoup ont du connaître. En ce sens il parle à chacun de nous. On regrette juste que ce « Livre 1 » se termine au moment de son entrée au Service de la Formation Aéronautique et on se prend à attendre impatiemment de pouvoir lire la suite. Mais si possible, Monsieur L’Harmattan, ailleurs que sur un écran…
Jean-Noël Violette
230 pages, format 13, x 21,5 cm
– NDLR : Comme chez nombre d’éditeurs, le service de presse des Éditions L’Harmattan ne dispose que d’un nombre contingenté d’ouvrages à distribuer gratuitement aux organes de presse. L’Harmattan a, semble-t-il, oublié l’Aérobibliothèque à parution, et en ce qui nous concerne, nous avons été informés trop tardivement pour disposer d’un service de presse « papier ».