En cette année 2009 finissante marquant d’une pierre blanche le premier centenaire de la traversée de la Manche par notre auguste Louis à bord d’un plus lourd que l’air motorisé, nombreux furent les ouvrages qui commémorèrent ce geste épique. Certains avec bonheur, d’autres plus laborieux. J’aurais aimé vous présenter un nouvel ouvrage avec un enthousiasme quelque peu débridé, mais force est de constater que celui-ci est un livre qu’il convient de présenter comme l’exemple de ce qu’il ne faut pas faire. Et c’est en ce sens qu’il est enrichissant et que je le recommande à tout futur nouvel auteur car c’est en évitant les poncifs du dérapage incontrôlé littéraire qui figurent ici quasiment tous à l’état de caricature que l’on peu se forger un standard d’écriture digne de ce nom. Prenons-le comme une sorte de jeu de piste, tant sur la structure confuse de l’ensemble que sur le détail du texte, je vous le répète, un modèle du genre !
Je laisserai au lecteur le soin de jouer au jeu des 36 erreurs, et je n’en citerai pas ici une liste exhaustive, mais simplement les plus inadmissibles comme confondre plus d’une quinzaine de fois Levasseur et Levavasseur, affirmer que ce sont les révélations de Clément Ader sur les brevets français qui boutèrent hors de France les frères Wright en 1909, que ces mêmes frères Wright étaient passés maître dans « l’art du spectacle », situer les terres de Roger Sommer (Mouzon) en Meurthe-et-Moselle et non dans les Ardennes, parler du circuit européen « endeuillé à deux reprises », alors qu’il y eu trois accidents mortels, survenant tous lors de la première étape, commenter une photo de Kimmerling située en juillet 1911 parlant de sa mort en juin de la même année, assassiner Eugène Lefebvre, le premier pilote tué, en l’accusant de brûler « la chandelle par les deux bouts » ; mentionner la firme américaine Curtiss comme l’un des acteurs majeurs du premier conflit mondial ; légender une photographie où figure Jane Herveux en « compagnie de Louis Blériot » sur un avion du même nom alors qu’il s’agit d’un Caudron G3 où la personne occupant le poste de pilotage n’a rien à voir avec Blériot et à mon avis, l’un des summum du strabisme divergent historique, montrer une photo d’un prototype Nieuport parasol de 1916 comme un brillant avion d’observation s’étant illustré lors de la bataille de la Marne … bref, vous l’aurez compris, il y a de quoi faire, le terrain est plus que miné, le tout écrit selon une séquence dont la logique reste à déterminer, et dans un style parfois infantile, souvent répétitif mais néanmoins non salvateur pour la connaissance du novice.
Toutefois, la partie purement consacrée à l’histoire de la Côte d’Opale et à la traversée de la Manche semble moins souffrir des défauts « généralistes » énoncés précédemment, l’intérêt principal de l’ouvrage, comme du reste la collection dans laquelle il veut s’insérer, tenant essentiellement dans la richesse des cartes postales publiées, certaines étant très connues, d’autres beaucoup moins (plus de 230 au total), mais gare aux textes qui auraient mérité pour le moins une réécriture avant réédition.
Thierry Matra
128 pages, 16,5 x 23,5 cm, couverture souple
240 photos