Profitant d’un échange entre Marine Corps et Navy, un pilote de F-4 repart pour son troisième tour d’opérations au Vietnam. La guerre commence à sentir la fin, les zones d’exclusion ont été supprimées, les bombardements reprennent au cœur du pays, et les rencontres avec les MiG se font plus nombreuses — au point que Towsend a enfin le combat aérien qu’il cherche depuis six ans.
Avec ce volet se clôt le triptyque Bombroad. Cet épisode est marqué par une petite réflexion sur le courage : celui auquel on se prépare — affronter un MiG quand on est pilote de Phantom — et celui qu’il faut trouver sur le tas — quand on se fait descendre et que son opérateur radar est aux mains de l’armée nord-vietnamienne. Et qu’est-ce que devient, une fois au sol, la grande gueule d’un pilote des Marines ?
Ce troisième épisode est aussi emprunt de lassitude, vu par un pilote fatigué qui se dit dès le départ qu’il est parti sans savoir pourquoi, qu’il aurait aussi bien fait de rester instructeur en Amérique et qu’il y a peut-être autre chose que l’appui-feu dans la vie — les doctoresses sont charmantes aussi de l’autre côté du Pacifique.
La série de trois volumes (Da Nang, Chu Laï et Yankee station) reprend ainsi symboliquement les trois âges de la guerre du Vietnam : d’abord l’arrivée d’une armée forte et conquérante, puis la désillusion d’une guerre qui ne tourne pas comme il faut et qui coûte trop cher en image et en dollars, et enfin l’ère finale où tout le monde sent qu’on est resté trop longtemps, qu’on n’a rien à faire là et qu’il est bien temps de rentrer.
Il y a, aussi, la prise de recul du narrateur, vieillard condamné par la maladie, qui aime avant tout se souvenir qu’il a passé sa vie à voler et qui avoue que malgré sa grande gueule et son côté franc-tireur, c’était bien confortable d’obéir aux ordres en ignorant le temps qui passe — à quoi bon s’inquiéter de l’avenir puisqu’on n’est pas censé s’en sortir et que le reste du monde nous méprise ?
Sur le plan graphique, on retrouve le style aisé et agréable de Kœniger (malgré toujours quelques écarts de perspectives, mais tous ceux qui ont essayé savent que le F-4 est délicat à dessiner). On retrouve surtout son sens aigu de la mise en pages et du rythme (alternance de planches très narratives et d’autres d’action pure, quasiment dépourvues de phylactères), ainsi que la superbe colorisation de Hartman, chaque scène ayant une gamme de teintes spécifiques permettant à la fois de soutenir les ambiances et de séparer les séquences.
Au final, Bombroad est clairement une des œuvres dont il faut disposer lorsqu’on s’intéresse à la guerre du Vietnam, ou plus généralement aux opérations militaires où cohabitent différents corps d’armée.
Franck Mée
48 pages, 24 x 32 cm, relié couverture cartonnée
0,624 kg
Les autres albums de la collection Bombroad
Avec l’aimable autorisation de © Éditions Paquet
Avec l’aimable autorisation de © Éditions Paquet
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