La RDN consacre son numéro de novembre 1918 au centenaire de la fin de la Première guerre mondiale, à travers treize articles, dont trois traitent de l’aviation militaire. Trois plumes se côtoient ainsi sur ce sujet : autant celles du lieutenant-colonel Jérôme de Lespinois et de Marie-Christine Villatoux sont-elles des habituées averties de la chose aéronautique, autant celle du député Christophe Lejeune, n’est-elle pas de la même veine. Le premier évoque utilement le rôle majeur et méconnu de l’aéronautique militaire en 1918, une année où on pourrait penser à tort que tout est gagné pour les Alliés face à l’Allemagne qui s’effondre. Il n’en est rien, les Allemands lançant des offensives de grande ampleur, l’auteur montrant alors que le « miracle de l’aviation » de 1918 consista à renseigner fidèlement et systématiquement le haut commandement des intentions et positions ennemies. L’observation stratégique à l’intérieur des lignes et son usage répété et méthodique étaient nés. La seconde donne une vision plus globale de l’aviation militaire française, sur quatre ans. En neuf pages synthétiques et claires, elle montre les trois phases par lesquelles l’arme aérienne a été édifiée, avec pragmatisme : l’exploration des possibilités militaires de l’avion, la prise de conscience de la prépondérance de la maîtrise du ciel, préalable à toute victoire terrestre et enfin, la mise en œuvre massive des moyens aériens.
Ces trois périodes majeures sont marquées par des hommes exceptionnels : Barès l’édificateur des débuts, De Rose, Brocard et Révérend les organisateurs de la chasse, Duval, l’homme de la concentration des forces aériennes. On a là un article à toujours avoir sous la main ou en mémoire, comme trame historique de base, indispensable pour recadrer tout récit aéronautique de 14-18 à sa bonne place.
N’hésitons pas à dire que le troisième article « aéronautique » n’a pas l’intérêt des deux premiers. Rédigé par le député de 2e circonscription de Haute-Saône, lui même natif de Luxeuil et fils de militaire Air, il se veut un rappel historique de ce que fut l’escadrille « La Fayette », symbole de l’amitié franco-américaine. Il se révèle finalement hors-sujet, plaidoyer pro domo pour le maintien de la base aérienne 116 de Luxeuil, un contre-exemple flagrant de ce que sont actuellement la plupart des plateformes militaires regroupant plusieurs unités navigantes et associées, alors que la BA 116 n’accueille plus qu’un seul escadron de chasse. Emaillé également de réflexions géostratégiques actuelles sans rapport avec la Grande Guerre, l’article ne manque pas d’inexactitudes notoires : l’escadrille « La Fayette » n’a jamais regroupé « l’ensemble des escadrilles américaines le 6 décembre 1916 » et par ailleurs, Luxeuil n’abritait aucune « base aérienne » durant la Grande Guerre, un terme impropre à cette époque. On oubliera donc ces dernières pages pour ne retenir que les deux premiers articles qui donnent brillamment toute sa valeur historique au fait aérien en 1914-1918.
Bernard Palmieri
136 pages, 17 x 24 cm, couverture souple
0,249 kg
Table des matières intégrale :
– La modernité du commandement de Foch en 1918 (C. Franc)
– La cavalerie blindée, une révolution dans le combat terrestre (Ch. Maisonneuve)
– Le « vrai miracle de l’aviation » pendant la Grande Guerre (J. de Lespinois)
– Le fait aérien dans la Grande Guerre : révolution dans les affaires militaires (M.-C. Villatoux)
– Gendarmerie et Grande Guerre, une histoire mal connue (L. Vidal)
– La guerre des codes : une cyberguerre avant la lettre (P. Villatoux)
– La marine suédoise et la Grande Guerre – pas si tranquille (L. Wendin)
– La Grande Guerre, inspiration de l’engagement artistique (C. Le Grip)
– La Grande illusion, un regard sur la guerre et l’Europe (Ph. Wodka-Gallien)
– Historiographie de la Grande Guerre : tentative de bilan en fin de centenaire (R. Porte)
– De l’importance du renouveau historiographique sur !a Grande Guerre (L. Henninger)
– Escadrille La Fayette et As de la Grande Guerre : les leçons du Centenaire (Ch. Lejeune)
– La mémoire, l’irremplaçable remède (L. Riael-Rajaoarinelina)
Bibliographie (S. Gadal – Ph. Wodka-Gallien)
Repères – Opinions
– Ce que nous dit l’histoire pour réussir notre avenir (Ch. Buchet)
– Les interventions en Afrique (J. Norlain)
– Focus sur l’emploi du vecteur aérien russe depuis 1979 : « leçons afghanes » (M. Pinel)
– Eye in the sky : les drones armés dans la politique d’assassinats ciblés des États-Unis (A. Vaillant)