Après la parution des quatre premiers volumes de la collection Dans le ciel de Pau, ouvrages collectifs réalisés par l’association de la Chapelle Mémorial de l’Aviation, et traitant en profondeur des débuts de l’aviation paloise (coup de cœur Aérobibliothèque 2010 pour l’ensemble des 4 premiers volets), que restait il donc à aborder dans le ciel béarnais ?
Les Éditions Cairn nous gratifient d’une véritable cerise sur le gâteau en publiant ce cinquième volet, consacré au sculpteur local Ernest Gabard dont l’œuvre oubliée ressemble fort à une couronne artistique alliant couleur locale et envolée lyrique.
Témoin de la venue de Wilbur Wright début 1909, ami du cercle restreint des pilotes fréquentant les écoles qui fleurirent jusqu’en 1913, décorateur occasionnel du restaurant local et sculpteur reconnu après des études dans la capitale où il fréquenta Rodin sans en être pourtant l’élève, il fut également l’illustrateur de ce qu’il convient d’appeler l’une des toutes premières bandes dessinées embryonnaires au format carte postal aquarellée donc uniques, contant les péripéties de Caddetou, le papé local, face aux découvertes des circonlocutions du Roplane de Virgule Vrïcht … à la double légende béarnais et français.
Fort de ses liens aéronautiques, c’est tout naturellement que l’on fit appel à lui pour dessiner la fameuse vignette de Pau Aviation, la première et seule affiche de meeting, mais surtout la coupe Paris-Pau qui fut attribuée à Védrines et dont ce dernier lui réserva, certainement à contrecœur, un usage nous rappelant que la vie de Julot ne fut pas simple. Mais comme poursuivi par cet élan de sculpteur aéronautique, c’est également lui qui fut désigné pour réaliser la coupe Jacques Schneider ainsi qu’une dernière moins connue qui fut la coupe Louis Blériot, prix de vitesse des 1000 puis 2000 (?) km/h qui devait succéder à la coupe précédente après que les Britanniques se la furent définitivement attribuée après les trois succès consécutifs des fameux Supermarine.
D’autres œuvres trouvent ici leur place comme la réalisation de la stèle des frères Wright, le monument Carayon-Meilhe et quelques autres sujets aéronautiques. La liste exhaustive des œuvres d’Ernest Gabard figure en annexe.
Cet ouvrage est à classer dans les « très beaux » livres, la riche présentation à l’italienne préservant la mise en valeur des aquarelles d’Ernest Gabard. Le texte sait se faire sobre face au graphisme simple mais évocateur du « choc de l’évolution » traité avec un humour poétique. Quelques coquilles sans incidence cependant, Chavez est décédé suite à sa traversée des Alpes et non — comme le laisse supposer le texte — des Pyrénées, et la reproduction de l’affiche initiale de la traversée des Pyrénées ne peut dater de 1906 car y figure un Blériot XI mais surtout une Antoinette : elle ne peut donc être antérieure au premier semestre 1909.
Un excellent ouvrage qui vient couronner un ciel de Pau déjà bien garni et dont la mise en page aurait pu probablement faire l’objet d’une présentation bilingue français / anglais, non seulement pour renouer avec une tradition anglophile locale mais surtout pour achever un cycle de juste retour des choses où Caddetou viendrait à son tour rendre visite aux frères Wright, pardon… Vrïcht !
Thierry Matra
98 pages, 31 x 24 cm, broché
Devant la qualité exceptionnelle de cette étude, nous avons attribué un coup de cœur à l’ensemble de la collection Dans le ciel de Pau
– Volume 1 : Les débuts de l’aviation : Wright 1909
– Volume 2 : Les plus légers que l’air
– Volume 3 : Blériot et les écoles d’aviation françaises
– Volume 4 : L’École militaire d’aviation
– Volume 5 : Ernest Gabard et l’aviation