Cet opus de 48 pages en grand format est une publication périodique d’une association historique implantée dans le département de la Nièvre. Il ne s’agit donc pas de l’œuvre d’un spécialiste de l’aviation, et il faut souligner ici le courage éditorial de produire ce petit ouvrage qui peut ne pas intéresser les nivernais férus d’Histoire plus ancienne, ou ne pas trouver au-delà de ses frontières un lectorat amateur d’aviation de la deuxième guerre mondiale.
Imprimé en couleur sur un épais papier couché, illustré avec profusion, la lecture en est aisée, facilitée par une succession rapide de courts chapitres. Dominique Bego aborde son sujet de manière chronologique, commençant par le pilote australien Gordon Panitz, natif de Boonah dans l’état du Queensland, et qui perd la vie à Bona, dans la Nièvre. Coïncidence étrange, la commune nivernaise étant même nommée Boona en 1196 ! Il poursuit par le navigateur Richard Sutton Williams, lui-aussi australien. Les deux aviateurs commencent à voler ensemble en août 1942 au sein du No. 456 Squadron, une unité de chasse de nuit basée au nord du Pays de Galles. Tous deux récipiendaires de la D.F.C. à l’issue de leur tour d’opérations, à l’automne 1943, leur équipage se reforme début juillet 1944, pour leur deuxième tour. Panitz vient juste de recevoir le commandement du No. 464 Squadron, équipée de chasseurs-bombardiers Mosquito FB VI. Le Roi George VI leur remet leur D.F.C. en main propre le 14 juillet 1944, et dans la soirée, ils prennent part au raid sur un cantonnement SS à Bonneuil-Matours.
Le 22 août 1944, les deux aviateurs trouvent la mort en heurtant le flanc d’une colline près de Bona, au retour d’un raid sur la gare de triage de Chagny, leur Mosquito lâchant une trainée de fumée. Enterrés dans le cimetière communal, où leur souvenir est régulièrement honoré lors des cérémonies patriotiques, il faut attendre les années 2000–2010 pour que des recherches historiques un peu plus poussées soient entamées. Elles culmineront par l’inauguration d’une stèle commémorative en octobre 2016. Ces démarches et les récits des derniers témoins visuels constituent la fin du livre.
Très plaisant et rapide à lire, le livre souffre malheureusement de nombreux petits défauts récurrents, liés à la méconnaissance de la Royal Air Force et des forces aériennes du Commonwealth. Par exemple l’attribution de quantième pour les numéros de Squadron de la R.A.F., qui n’en portent jamais, des traductions hasardeuses comme le grade de Pilot Officer en pilote officier, des simplifications ou confusions. Dominique Bégo s’est en partie inspiré du livre de Lex MacAuley « Mosquito intruder crew » ce qui est une bonne référence, mais probablement par ignorance, n’a pas consulté les Operations Record Book des unités concernées, qui auraient apporté de nombreux compléments, ni les Casualty Files des aviateurs australiens, ou d’autres sources primaires (rapports de combat, form 78, etc). Il a cependant bien eu recours aux dossiers militaires de Panitz et Williams accessibles en ligne sur le site des archives nationales australiennes.
Il serait donc dommage de se priver de cette très belle production locale, d’un prix modique, au prétexte de ces nombreuses erreurs de détail. L’important n’est pas là, il est dans l’hommage rendu à Gordon Panitz et à « Dickie » Williams, et dans la trace écrite laissée par cette publication régionale. Et qui sait, peut-être une nouvelle édition améliorée et complétée pourrait un jour être publiée.
Jocelyn Leclercq
48 pages, 24 x 31 cm, broché
0,250 kg