On ne devrait plus présenter Jean de Pange (1917-1999), aviateur Français libre dont l’engagement sans faille le conduira, après la défaite de 1940, à rallier les FAFL pour participer aux campagnes du Gabon, du Tchad, de la corne de l’Afrique et rejoindre l’URSS pour finir par fouler le sol allemand. Le fait qu’il soit navigateur sur bombardier puis pilote de liaison, et non chasseur aux multiples victoires, le place quelque peu dans l’ombre d’un Clostermann ou d’un Mouchotte. Et pourtant ! Avec 517 missions de guerre, après avoir servi directement Leclerc à Koufra au sein du GRB 1, et côtoyé les premiers pilotes du « Normandie », la carrière militaire de de Pange constitue une des pages les plus complètes de l’histoire mouvementée des FAFL, en particulier à leurs débuts difficiles. Son livre de souvenirs en est bien la preuve : outre la relation en détails de la vie quotidienne souvent spartiate des aviateurs Français Libres, que ce soit au casernement ou en vol, l’ouvrage est largement émaillé de nombreuses réflexions politiques de l’intéressé, livrées au fil de ses missions, déplacements, repos et actions. Parmi tant d’autres, l’une d’entre elles résume à merveille la situation personnelle dans laquelle se trouvait tout Français Libre désirant poursuivre la lutte contre l’Occupant : « il était ridicule d’être accusé de désertion pour continuer la guerre, par des gens qui précisément, ne voulaient pas se battre ». De Pange est par ailleurs très sûr de son engagement patriotique et cela, très tôt, dès la bataille de France où il est navigateur au GAO 546, discutant au coin du feu avec « la vraie France », la vieille dame qui l’héberge, à Chichey, entre deux missions.
Son attachement à la France le situe aussi pleinement dans sa longue lignée familiale lorraine qui, depuis le XVIIIe siècle et le marquis François de Pange, n’a de cesse d’affirmer son amour profond du pays à travers actes et écrits. Les 343 pages de ce livre, enrichies de six cahiers photos et de reproductions de documents personnels, préfacées par Pierre Messmer, peuvent donc être lues à deux niveaux : celui de l’aviateur dont l’action s’inscrit dans la guerre aérienne et terrestre de 1940 à 1944, et celui du patriote qui endure les affres de l’éloignement et de son bannissement par le pouvoir en place, et qui réfléchit chaque jour au devenir de son pays à libérer, but ultime et jamais perdu de vue.
Cet ouvrage constitue une réédition de celui intitulé « Nous en avons tant vu, 1940-1945, de Koufra au Normandie-Niemen », publié en 1990 par les Éditions Serpenoise, devenues Éditions Le Quotidien après fusion avec La nuée bleue.
Bernard Palmieri
348 pages, 16 x 24 cm, broché
0,760 kg