Depuis ce jour d’août 1945 où fut larguée sur Hiroshima la première bombe atomique, l’arme nucléaire n’a cessé de préoccuper la planète, dans une sorte d’équilibre hasardeux et préoccupant. On se souvient de l’inquiétude qui régna à ce sujet pendant la Guerre froide, en particulier en octobre 1962 lors de l’affaire des missiles de Cuba, inquiétude qui ressurgit épisodiquement, par exemple récemment au sujet de l’Iran ou de la Corée du Nord. À cette anxiété persistante, certains ont cru bon de répondre par un désarmement… que d’autres estiment à la fois illusoire et dangereux. On le comprendra, les questions sont nombreuses et ardues.
L’ouvrage se découpe en deux grandes parties. La première, intitulée « L’armement nucléaire des origines à 2014 », est la pièce maîtresse de ce livre très organisé. Cette histoire de l’arme atomique en aborde tous les aspects, depuis l’évolution des systèmes d’armes au coût de l’armement nucléaire, en passant par les traités, la révolution nucléaire et ses conséquences, ainsi que les défenses contre les missiles balistiques.
La seconde partie est nécessairement plus courte, puisque qu’elle aborde la question de l’armement nucléaire dans le monde futur, ce avec les aspects spéculatifs que cela présuppose. Pour commencer, les auteurs n’imaginent pas un instant un monde militairement « dénucléarisé ». Au contraire, ils considèrent (et le présent semble leur donner raison) que, si pour certaines puissances il est peu probable qu’elles envisagent d’accéder à la technologie de la bombe atomique (puisque ne se sentant pas menacées), d’autres cherchent ou chercheront à s’en doter. Un chapitre, aussi intéressant que pertinent, est consacré à l’évolution des risques liés à l’armement nucléaire, avec un inventaire des éventuels points chauds susceptibles de dégénérer en conflits majeurs, partie que Jacques Villain et André Motet concluent par une nécessité de la France à se maintenir comme puissance nucléaire majeure.
Si le texte constitue l’essentiel du livre, il est enrichi d’éléments iconographiques (photographies, plans, croquis, cartes) et de tableaux d’une utilité certaine, de même que de cinq annexes et de l’indispensable glossaire (trois pages).
L’ouvrage n’est pas des plus faciles, essentiellement en raison de sa densité. L’étude, menée par deux éminents spécialistes, est féconde et fait le point de façon argumentée sur l’évolution de l’arme nucléaire, de ses vecteurs, des stratégies qu’elle infléchit et de son rôle dans les relations internationales. Ce livre consistant s’avère néanmoins « digeste » en raison de sa structure intelligemment ordonnée. Par ailleurs, le vocabulaire utilisé est d’une relative simplicité, ce qui rend l’ouvrage accessible à des non-spécialistes. Un livre de vulgarisation ? Peut-être pas. En tout cas un document que les auteurs ont voulu à la fois fécond et aisément compréhensible malgré sa relative aridité, et qui dresse dans un volume relativement restreint un tableau complet du passé, du présent et de l’éventuel futur proche, de l’arme atomique.
Philippe Ballarini
206 pages, 17 x 24 cm, couverture souple
0,385 kg