Dieppe 1942

Les Américains en action
Thierry Chion

Le choix d’un titre est important : il laisse entrevoir au futur lecteur ce qu’il trouvera essentiellement dans le livre. C’est d’autant plus important lorsqu’il s’agit d’un ouvrage de nature historique. Avec comme titre Dieppe – Les Américains en action 1942, on est en droit de s’attendre à ce que la participation américaine constitue la quasi intégralité du récit. Or ce n’est pas vraiment le cas, cette partie ne constituant peu ou prou que la moitié du livre, soit environ 70 pages sur les 156 que compte le volume. Néanmoins, cette partie évoque non seulement les Américains engagés dans la RAF, mais également les unités de l’USAAF ayant participé de près ou de loin à l’opération Jubilee, ce qui est plutôt un avantage. Sachant que Dieppe est avant tout une opération britannico-canadienne, l’auteur a eu raison de se livrer à cet exercice, d’autant plus qu’il n’oublie pas les troupes au sol. L’étude sort néanmoins un peu de son cadre quand l’auteur inclut les unités ayant participé aux opérations du 19 août sur des avions d’origine américaine comme le Mustang ou le Boston ; la démarche est difficilement compréhensible. Ceci étant, cette partie du livre est riche en témoignages de tout ordre et s’avère plutôt bien développée.

Dans ces conditions, de quoi est constitué le reste du livre ? En fait, la trame principale tourne autour des ‘Eagles’. Les ‘Eagles’, ce sont ces pilotes américains qui ont rejoint la RAF ou la RCAF avant que les États-Unis n’entrent en guerre. Ils furent regroupés au sein de trois unités de chasse, d’abord au sein du N° 71  Squadron, puis aux N° 121 et 133. Il faut noter que l’auteur nomme les unités de la RAF à la manière américaine, ce qui irrite quelque peu : les traditions militaires britanniques n’ont pas à être « américanisées », quelles que soient les circonstances. Les 70 premières pages sont donc consacrées à la naissance des ‘Eagles’ et à leur emploi opérationnel jusqu’au 19 août 1942. Cependant, l’auteur se focalise plus sur le parcours de ces hommes que de leurs missions de guerre qui sont de fait à peine abordées. Ceci l’amène à avoir un style qui casse quelque peu le rythme de la lecture, qui donc n’est pas toujours plaisante; on en perd même parfois le fil de l’action. Cependant, certains parcours personnels s’avèrent très intéressants. L’auteur a fait une très bonne recherche iconographique, et dans l’ensemble les photos sont pertinentes et de qualité, même si on peut regretter l’absence quasi-totale d’avions dans ce livre. Les ‘Eagles’ ont fini par rejoindre l’USAAF* à la fin de septembre 1942. Thierry Chion n’oublie pas le désastre de Morlaix du 26 septembre 1942 *, intervenu trois jours avant la dissolution des trois unités de la RAF et le transfert des pilotes et avions sous la bannière américaine.

Si la structure du livre ne convaincra pas nécessairement un amateur averti, il n’en demeure pas moins qu’y figurent quelques bonnes photos ainsi que d’autres informations à glaner, même si l’auteur n’a pas fait complètement le tour du sujet des ‘Eagles’.

Phil Listemann


160 pages, 21 x 29,7 cm, couverture souple


NDLA :

* USAAF est l’abréviation de United States Army Air Force et non USA Air Force, ainsi que l’écrit l’auteur.
* Au sujet cette mission catastrophique, Thierry Chion aurait peut-être pu approfondir un peu et relever que les pilotes qui ont été tués au cours de cette désastreuse mission figurent à la fois dans les registres de pertes de la RAF et ceux de l’USAAF, respectivement avec leur grade et matricule de la RAF ou de l’USAAF, ce qui est de facto une anomalie, car ils sont comptés deux fois dans les pertes alliées.
Par ailleurs, il aurait peut-être été envisageable de rappeler que cet événement avait quelque peu assombri les relations à haut niveau entre Britanniques et Américains : les avions perdus cette journée-là étaient des Spitfire IX flambant neufs, avions très rares à cette époque et qui venaient juste de faire leur débuts opérationnels. Les Britanniques avaient voulu privilégier les ‘Eagles’ pour des raisons davantage diplomatiques que militaires, et il avait été prévu de rééquiper les trois futurs escadrons du 4th  FG de Spitfire  IX. Mais furieux de voir comment les pilotes américains avaient perdu ces précieux Mk  IX, la RAF a finalement changé d’idée et fourni à la place des Mk V moins performants, ce que les Américains n’ont pas vraiment apprécié.


Dieppe 1942
Dieppe 1942

Avec l’aimable autorisation des © Éditions Ysec

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ISBN 978-2-84673-238-3

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