Alors que l’on semble de plus en plus se rapprocher du tourisme spatial pour tous, cet intéressant ouvrage réalise la première synthèse sur le sujet, en se concentrant fort justement sur la première phase, bien plus facile, des vols suborbitaux. Les auteurs sont des experts du sujet, avec l’astronaute Jean-François Clervoy, PDG de Novespace, des ingénieurs, médecins et juriste.
Après un rappel historique, les véhicules et les astroports en développement sont décrits, associés à la nécessaire étude de marché. Les aspects techniques, médicaux et juridiques sont également traités.
Clarifions la notion de frontière entre air et espace : non sans raison, USAF et NASA l’ont fixée à 50 miles, soit environ 80 km, donnant ainsi à 7 pilotes d’X-15 leurs ailes d’astronaute ― les premiers vols suborbitaux d’avions spatiaux. 99% de la masse de l’atmosphère se trouve en effet sous cette barre. Par ailleurs, un satellite en orbite basse ne peut précisément pas accomplir de tour supplémentaire une fois arrivé à environ 80 km ― notre atmosphère gonflant plus ou moins en fonction de l’activité solaire. La Fédération Aéronautique Internationale (FAI), qui homologue les records aérospatiaux, a de son côté choisi un chiffre rond, 100 km, aussi appelé la ligne de Von Karman.
Le volet histoire contient une intéressante révélation, celle du projet d’avion spatial étudié après-guerre par le chinois Tsien. Une caractéristique remarquable du couple White Knight/SpaceShip est l’emploi du même fuselage avant, facilitant notamment l’entraînement des équipages.
Concernant le marché des vols suborbitaux, la réalisation d’expériences scientifiques est à présent initiée, avec plusieurs contrats signés : il y a là un créneau assuré, en complément des fusées-sondes.
Sur les aspects techniques, signalons l’étonnante révélation en 2008 que l’équation de la fusée a été établie dès 1871 par le général belge Coquilhat, 26 ans avant Tsiolkovsky, de surcroît sous forme généralisée.
Sur les aspects physiologiques, l’influence du volume disponible dans un véhicule spatial sur le mal de l’espace est confirmée : il est en effet recommandé les premiers jours du vol de minimiser tout mouvement, afin de laisser au corps le temps de s’accoutumer.
En bref, voilà un guide indispensable à tout candidat au vol suborbital ! D’où la présence en annexe de quelques compléments ou corrections à l’attention du lecteur assidu.
Philippe Jung
320 pages, 15,5 x 24 cm, broché
Annexe :
Compléments/corrections
Rajoutons quelques étapes importantes, telles que le film Die Frau in Mond de 1928, les programmes soviétiques pionniers, du Chelomei MP-1 de 1961 à Spiral (avec les BOR et le MiG-105 de 1966 à 1988), les Transporteurs Aéro Spatiaux de Nord-Aviation et Dassault dans les années soixante, le X-23A et plus récemment les X-37 et X-40 américains, ainsi que les HSFD japonais.
Par ailleurs le programme X-24 d’avion supersonique à fuselage porteur ne fut pas le successeur du programme hypersonique X-15, le X-24C ayant d’ailleurs validé le concept d’une navette spatiale, se posant en plané sans réacteur d’appoint.
Le pionnier Robert Truax était un ancien de l’US Navy.
Notons qu’il a fallu plus que 3 vols au SpaceShip One (premier vol, en plané, le 7 août 2003 – les vols du tableau sont les n° 15P à 16P) pour atteindre la barre des 100 km, et que son abandon est dû à de mauvaises qualités de vol.
Au sujet de l’Airbus « Zéro G », précisons que si Air Inter a bien employé l’A300B, c’est Air France qui en fut le premier utilisateur en 1974.
l’Airbus « Zéro G », La liste des touristes ne se résume pas aux sept, toujours mis en avant, de Space Adventures (depuis 2001), les premiers ayant été en réalité les sénateurs américains Garn et Nelson dès 1985/86, puis le premier touriste commercial, le journaliste japonais Akiyama en 1990, suivi de l’anglaise Helen Sharman en 1991, etc.
Notons que « angle d’attaque » est un anglicisme, « incidence » étant correct.
Quant à la température de peau d’une navette spatiale, les 1 500 °C indiqués sont au niveau de l’intrados de l’aile : c’est 1 800 °C pour le nez et les bords d’attaque des ailes.
Au niveau juridique, le cas délicat des dommages causés aux tiers par un accident aurait mérité d’être abordé.
Un certain nombre de points sont à préciser: DTS (?), CO² et O² (et pas FiCO ou FIO² ?), HTPB (Hydroxyl Terminated Poly Butadiene), x-y-z (axes de roulis, tangage et lacet respectivement).
Pour ce qui est des sociétés et astroports, Thunderstar est britannique. Worldview Spaceflight est inconnue et Armadillo ne semble pas avoir utilisé Oklahoma Spaceport, mais plutôt Caddo Mills, Las Cruces et Holloman. Notons que c’est Energya, anciennement l’OKB-1 de Korolev, qui a développé Bourane.
Quelques coquilles, Alexandr Volkov, James Doohan, Randolph Field, ainsi que des désignations incorrectes, celles qui sont correctes étant : A 4, V 2, B727, A300, J85, Falcon 7X, Mu-300, GII et Il-76.
Au niveau du lexique enfin, l’immatriculation identifie bien sûr aussi l’objet, puisqu’elle doit être portée sur le véhicule. L’impulsion spécifique correspond à la durée de combustion en secondes d’un moteur fusée qui aurait 1 N de poussée avec un débit-poids de 1 kg/s.