Sous la forme d’un roman graphique, Jean-Jacques Ninon nous fait découvrir, comme le précise le sous-titre, la courte vie d’un célèbre niçois inconnu. Honoré d’une place à son nom dans la ville de Nice, c’est parce qu’il était aviateur que cette biographie a sa place ici.
Dans une préface qui est plutôt un avant-propos, l’auteur explique avoir connu cette place Eugène MÔ pendant des décennies, avant de découvrir la plaque expliquant qu’il était aviateur, mort pour la France en 1915. Même les célébrations du centenaire de la Grande Guerre n’ont pas réussi à le soustraire à l’oubli, et c’est maintenant chose faite avec cet ouvrage, destiné davantage à un jeune lectorat, comme l’indique la fin de la préface, mais qui conviendra tout autant à des adultes, une fois l’aspect « roman graphique » accepté et assimilé.
Le jeune Eugène voit donc le jour en 1891 et l’enfant assiste aux expérimentations du capitaine Ferber à Nice. Il devance l’appel et commence son service en octobre 1909 comme sapeur aérostier de deuxième classe. En octobre 1912 il incorpore le 2e groupe aéronautique de Reims, toujours comme mécanicien, alors que bien sur il ne rêve que de devenir pilote. L’inaction le pousse à la désertion au bout de quelques semaines et il ne sera capturé par les gendarmes qu’en mai 1914. Il est condamné le 30 juin à un an de prison avec sursis, son contrat arrivant à son échéance le 11 juillet 1914. Mais la déclaration de la guerre le 3 août voit le retour d’Eugène MÔ sous l’uniforme.
Affecté à la N12 devenue MS12, mais toujours au sol, il décide de se porter volontaire pour les missions spéciales, espérant ainsi se faire remarquer pour son patriotisme, et obtenir une formation de pilote. Formé à la prise de renseignement en terrain ennemi, il est déposé dans une clairière des Ardennes le 4 mai 1915. Rapidement capturé, en tenue civile, il est condamné par les Allemands comme espion le 20 mai, et passé par les armes le 5 août 1915.
L’œuvre graphique de Jean-Jacques Ninon est assez réussie, faisant appel à plusieurs techniques et styles. Parfois un dessin évoquant Marcel Jean-Jean, coloré, d’autres illustrations monochromes évoquant des cartes postales, ou des portraits de personnages célèbres évoqués dans le récit. Des notes de bas de page complètent le texte. Elles serviront surtout au jeune lectorat.
Au vu de la brièveté de la vie d’Eugène MÔ et de la rareté des sources, cet ouvrage biographique basé en partie sur la correspondance de l’aviateur, est une bonne reconstitution de ce qu’il a pu vivre et penser.
Jocelyn Leclercq