Pour celles et ceux qui sont né(e)s dans les années de l’après-guerre, la référence en matière d’observation fut longtemps l’observatoire du Mont Palomar (États-Unis), avec son télescope Hale qui, du haut de son altitude de 1706 m, demeura longtemps le plus gros (et le plus puissant) du monde. Mais les télescopes terrestres ont leurs limites, en l’occurrence celles qui sont générées par l’atmosphère terrestre. Peut-être avez-vous parfois observé, dans le ciel nocturne, au-dessus de l’horizon, une apparente vibration des étoiles, laquelle est simplement due aux oscillations des couches atmosphériques que doit traverser la lumière des astres avant de nous parvenir. La solution ? Se débarrasser de ce « filtre » gênant qu’est l’atmosphère en installant les appareils d’observation… dans l’espace. Cela a été rendu possible par les progrès continus de la technologie aérospatiale.
Le télescope spatial est une solution moderne à un projet ancien, puisque dès les années vingt, Hermann Oberth, l’un des pionniers du voyage spatial, envisageait la mise sur orbite d’un télescope. À peine Spoutnik 1 tournait-il autour de la Terre (1957) que des scientifiques, Lyman Spitzer en tête, bataillaient pour que ce projet prenne forme. Il fallut bien du temps, bien des progrès (et de l’entêtement) pour qu’en 1990, Hubble, cet instrument extraordinaire*, soit mis en orbite par la navette spatiale Discovery.
La différence entre télescope terrestre et télescope spatial est énorme. Pour l’illustrer, imaginez que vous plongiez sous l’eau les yeux nus, sans protection, puis que vous y retourniez avec un masque. Sans compter le fait que, pour des raisons de physique élémentaire, un télescope terrestre ne peut capter ni l’infrarouge ni l’ultraviolet, tous deux étant interceptés par l’atmosphère.
Tout cela est bel et bon, mais laisse de côté l’un des aspects fondamentaux du sujet : la puissante poésie qui émane des images collectées par Hubble. Taschen a justement mis sa maîtrise du « beau livre » — dont cet éditeur est un éminent spécialiste — au service de cette dimension quasi-onirique. L’un des chapitres de ce splendide Expanding Universe est intitulé « We are all starstuff » que nous pourrions traduire (assez librement) par « Nous sommes tous de la poussière d’étoiles. » Car cette sensation d’infini, au-delà de l’émerveillement esthétique, nous donnerait volontiers le vertige. Cette splendeur spatiale nous fascinerait volontiers, nous amenant à nous demander si c’est bien cet univers-là qui nous entoure.
Ne cherchez pas trop de données techniques ou scientifiques dans cet ouvrage dédié à l’image. Mais bien entendu, une illustration non légendée n’ayant aucune valeur, on trouvera le nécessaire en fin de livre. Plutôt que de gâcher une iconographie exceptionnelle et y insérant du texte, l’éditeur a regroupé les légendes dans un « photo index » donnant le nom de l’objet céleste photographié, sa classification et sa distance moyenne* par rapport à notre bonne vieille Terre. Les trois quarts du livre sont occupés par des photos en pleine page. Le reste est composé des légendes des photos, d’une interview de Zoltan Levay, des explications indispensables (sur les « fausses couleurs », par exemple), un glossaire, etc. Le titre « Expanding universe » (L’univers en expansion) laisse entendre un ouvrage en anglais. Or, ce livre — dont l’intérêt essentiel réside dans l’iconographie et le façonnage — est trilingue ; les textes les plus importants sont publiés en anglais, en allemand et en français. Faut-il une fois de plus insister sur la qualité dont les éditions Taschen sont coutumières : papier couché de qualité supérieure, impression irréprochable, reliure robuste et soignée…
Puisqu’il n’est point de louange crédible sans un minimum d’observation, peut-être pourra-t-on remarquer une utilisation apparemment superflue d’un filtre « étoile à quatre branches ». Mais ne soyons pas vétilleux : ce livre est tout simplement superbe et, ô surprise, étonnamment bon marché (30 € !) Objet de rêverie, de documentation, élément de décoration si vous préférez le laisser sur la table basse du salon, c’est encore une réussite dans le domaine du « coffee table book* » que nous proposent les Éditions Taschen. Voilà une bonne idée-cadeau qui fera mouche… sans mettre à mal le porte-monnaie de Saint Nicolas, du Père Noël ou de la Befana*.
Philippe Ballarini
260 pages, 29 x 29 cm, relié + jaquette
2,470 kg
– Édition trilingue anglais-allemand-français
* Le remplacement de Hubble par un autre télescope spatial, nommé James-Webb est envisagé pour le 18 décembre 2021.
* Les distances sont données en :
– Milles (1 mi ≈ 1,6 km)
– Unités astronomiques (1 AU ≈ ≈ 150 millions de kilomètres)
– Années-lumière (1 ly ≈ 63 000 unités astronomiques ou 10 000 milliards de kilomètres)
* coffee table book : Littéralement, « livre de table à café ». Le livre que l’on laisse sur la table basse du salon. En France, on appelle simplement « beau livre » ce genre d’ouvrage parfois proche du livre d’art.
* Le prix de vente n’est indiqué ni sur la couverture ni sur la jaquette ; personne ne passera pour un ladre.
Avec l’aimable autorisation des
© Éditions Taschen
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