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Fatal Beauty, une ombre aux ailes coupées ?

Jan Kovac

Lorsqu’on prend en main ce livre on est immédiatement surpris par son petit format (10 x 15 cm), la qualité grossière du papier et l’utilisation d’une police de caractères d’origine scandinave peu agréable. Les innombrables renvois en bas de page, imprimés en rouge, ne rendent pas la lecture plus fluide. Mais on peut se dire que dans un tel format la lecture sera rapide et que le sujet mérite l’attention. Rappelons que le premier Northrop-Grumman B-2 Spirit fut surnommé Fatal Beauty, et que cette merveille de technologie n’a été construite qu’à 21 exemplaires.

Le premier chapitre tente de démontrer pourquoi les architectes ne peuvent intervenir dans la conception de structures mobiles en général, aériennes en particulier. On y apprend :
– Page 12 : que durant la Guerre Froide Boeing construit 800 B-29 par mois. La production du B-29 a cessé en réalité en 1946 et le chiffre de 800 est hautement fantaisiste.
– Page 13 : que le F-16 est une success story Lockheed Martin. C’est oublier que le F-16 a été conçu et produit pendant 20 ans par General Dynamics avant d’être cédé à Lockheed en 1993.
– Page 14 que « Northrop Grumman est la seule compagnie référencée à l’indice S&P 500 […] qui gère un champ de compétences […] des abysses au cosmos ». Décidément General Dynamics n’a pas la cote !
– Page 18 : YB-35, XB-35, F-16, B-2, etc. : La codification des projets utilisée par les différents constructeurs et l’US Air Force ne répond pas à une norme claire. (sic)

Le lecteur averti n’ira probablement pas plus loin, mais pour les courageux ou les néophytes la lecture se poursuit avec une énumération sommaire de quelques programmes d’avions supposés préfigurer le B-2 : Ailes volantes Northrop, Lockheed U-2, Concorde, Tupolev 160, B-1 Lancer et bien entendu F-117. Un inventaire à la Prévert parsemé d’erreurs techniques comme une curieuse définition du statoréacteur qualifié de « réacteur statique ».

Suit une description chronologique du programme ATB avec quelques approximations et qui s’égare rapidement dans une analyse de la méthodologie applicable à la mise en place d’un programme industriel mettant en œuvre de nombreux sous-traitants. Reprenant une étude de Xavier Laurent disponible sur Internet, l’analyse des facteurs contribuant à la furtivité du B-2 est correcte en fonction des données connues sur le sujet.

Arrivé à ce stade le lecteur s’attend probablement à une analyse de l’utilisation opérationnelle du Spirit justifiant le titre de l’ouvrage. On lui offre en échange 44 pages d’illustrations de qualité médiocre, imprimées sur un papier rouge, dont la pertinence n’est pas toujours en rapport avec le texte qui précède. Un court chapitre sur l’évolution possible de la formule du B-2 vers les drones,
X-47 en particulier, sert de conclusion à l’ouvrage.

On peut comprendre que l’éditeur de cet ouvrage, les Éditions B2, qui ont pris pour logo la silhouette du bombardier B-2 Spirit, aient eu la tentation de consacrer un volume de leur collection Design à ce produit technologique. Il est regrettable qu’ils en aient confié la rédaction à un architecte plutôt qu’à une personnalité reconnue de l’industrie ou de l’édition aéronautique.

Jean-Louis Bléneau


112 pages, 10 x 15 cm, relié
0,086 kg

Ouvrages édités par
En bref

Éditions B2

ISBN 978-2-36509-013-1

19 €