Guerre froide et guerre d’Algérie

1954 – 1964
Témoignage sur une période agitée
Général (air) Michel Forget

Guerre froide et guerre d’Algérie, 1954-1964, préfacé par Pierre Messmer, du général (air) Michel Forget, est un témoignage passionnant sur des événements exceptionnels, vécus par un capitaine pilote de chasse, confronté simultanément à la montée en puissance de l’Armée de l’air dans l’OTAN, et à la guerre d’Algérie dans son cortège de drames.

De Batna dans les Aurès, comme adjoint d’un PC air et pilote de T-6, jusqu’à Alger, près du général Challe, Commandant en chef des forces, il vit la guerre d’Algérie en vol et au sol comme officier d’état-major interarmées.

D’une base aérienne en RFA, sur Mistral puis Ouragan, ou de celle de Dijon sur Mystère IV puis Mirage III-C, il participe à la modernisation des unités aériennes vers une armée de l’Air réorganisée, alignant près de 800 avions de chasse et préparant l’ère nucléaire.

C’est un grand écart pour l’armée de l’Air, entre les deux rives de la Méditerranée, mettant en œuvre ici des escadres dotées d’avions de chasse les plus modernes, et parrainant là-bas, des unités d’avions à hélice, datant de la dernière guerre mondiale, où ses pilotes sont détachés pour un an.

C’est une cassure pour la France qui va perdre l’Algérie, après les accords d’Evian, annonciateurs d’une tragédie pour les rapatriés et les harkis qui y perdront tout, jusqu’à la vie.

De l’Algérie, comme pilote et chef aérien, il présente les missions des forces aériennes des trois armées (Air, Terre, Mer). Les avions de chasse « légers » (T-6, Fennec) et « lourds » (Mistral, F-47, AD-4, Corsair…), les hélicoptères (Bell, H-34, H-21 « Banane »), les avions d’observation et de liaison (Cessna L-19, Broussard…), de transport (N-250 Noratlas), sont en appui des forces terrestres ou agissent seuls pour détecter et pourchasser l’ennemi, grâce à une organisation du commandement de plus en plus efficace. Il s’agit de surveiller les convois routiers ou ferroviaires, de détecter la présence ennemie en rasant à basse vitesse les flancs d’une montagne piégeuse par ses rabattants ou sa mauvaise météo, sous la menace permanente d’une rafale de mitrailleuse. Il faut soutenir les troupes au sol en « bouclage », aidées par les « Pirates » (hélicoptères armés), en attaquant et bombardant sous le feu adverse, guidé par un PC volant. Il faut enfin surveiller le ciel et les frontières, empêchant toute incursion terrestre, aérienne ou maritime (Mistral, SMB-2…)

À ce jeu, les pertes et blessés sont nombreux tout au long du conflit, la fraternité d’arme est totale, dans l’action comme dans la haine du FLN sans pitié.

Officier d’état-major à Alger, l’auteur est au Bureau Études et Liaisons chargé de la guerre psychologique et du point de situation journalier du général. À ce poste, il apprécie la remarquable conduite des opérations pas forcément synonyme de victoire, car le destin du pays se joue ailleurs, comme le cache le discours politique. L’ambiance des unités militaires en souffre, surtout dans les heures sombres, comme lors du putsch des généraux.

En métropole, qui veut sortir de la guerre d’Algérie avec le général de Gaulle, il vit le renforcement de la chasse du début de la Guerre froide, sur des avions Mach 2, et observe dépité les derniers soubresauts d’une Algérie française dont la cause est perdue.

Le grand intérêt de cet ouvrage, paru en 2002, est le regard sans concession qu’il porte sur une période agitée pour en comprendre la complexité historique, de l’œil critique d’un pilote de chasse ambitieux pour son arme et son pays. Il réside aussi dans l’actualité de ses analyses sur l’emploi des forces aériennes, alors que des Rafale hyper sophistiqués survolent chaque jour les montagnes afghanes pour débusquer les moudjahidin talibans.

À lire ou relire absolument !

Colonel Richard Feeser


330 pages, 15,5 x 24 cm, broché
Préface de Pierre Messmer

En bref

Éditions Economica

ISBN 2-7178-4411-2

30 €