Si l’aérodrome de Melun-Villaroche résonne encore aujourd’hui du son des avions de collection qui y sont basés, l’ouvrage de Robert Lamouche vient nous rappeler le passé exceptionnel de cette plate-forme née quelques mois avant le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale.
Utilisé successivement par l’armée de l’Air, la Luftwaffe et les USAAF, le terrain va connaître après la fin du conflit sa véritable heure de gloire, abritant pendant de longues années les essais en vol de nombreux constructeurs et motoristes au cours de ces heures particulièrement brillantes, mais parfois douloureuses, de l’aéronautique française, même s’il lui fallu rapidement partager ce rôle avec l’aérodrome d’Istres aux abords moins urbanisés, et à la météo plus clémente — quand le Mistral ne souffle pas…
Le présent ouvrage est la troisième édition du travail de Robert Lamouche, justifiée par l’épuisement de deux précédentes – preuve d’un intérêt certain pour le sujet, en particulier de la part des très nombreux acteurs de cet « âge d’or » de notre industrie aéronautique; on peut le considérer comme une forme de référence, à défaut d’un étude plus récente du sujet, car il ne faudrait que le lecteur soit induit en erreur par un titre qui a évolué depuis la première édition*: le texte lui-même n’a reçu que de très modestes modifications et compléments, essentiellement à propos de la SNECMA et du musée Safran, les « scènes de chasse » sur l’aérodrome ayant même — regrettablement — disparu ! De plus, rien n’est dit des collections qui occupent le terrain, au premier rang desquelles l’AMPAA, au moins sur le plan chronologique.
Si l’ensemble forme un solide récit de l’histoire de ce terrain, avouons que la partie traitant des essais en vol nous laisse toujours un peu sur notre faim, comme il y a 23 ans : par exemple, le chapitre consacré au Avions Marcel Dassault ne compte que six pages de texte, suivies de 20 autres pages de photos et de fiches succinctes qui ressemblent davantage à un catalogue du constructeur…
Plus généralement, même si l’auteur semble s’être intéressé depuis à des sujets complètement différents de l’histoire de sa région, n’a-t-il pas continué à mener des recherches sur l’histoire de l’aérodrome ? N’y avait-il pas matière à repenser un texte écrit vingt ans auparavant ?
Pour terminer, il faut également parler de l’iconographie de l’ouvrage. Lors de la parution de la première édition, l’ouvrage avait été quelques peu été éreinté par Michel Bénichou dans les colonnes du Fana de l’Aviation : il reprochait à l’auteur d’avoir recouru à des photos issus des divers constructeurs, sans réel rapport direct avec le site de Villaroche, alors que celles-ci existaient, en particulier dans les collections du Musée de l’Air. Rencontré quelques mois plus tard, Robert Lamouche s’en était clairement expliqué: les tarifs pratiqués par cette institution publique n’étaient pas à la portée de la bourse d’un particulier ! S’il est à craindre que la situation, elle non plus, n’ai hélas pas beaucoup changé en 23 ans, cette longue période n’aurait-elle pas pu être mise à profit pour « négocier » une ristourne, ou bien, grâce à l’apparition d’Internet, faire appel à des collectionneurs privés ?
Quoi qu’il en soit, il faut honnêtement reconnaître que la valeur d’ensemble de l’ouvrage lui permettra de trouver certainement de nouveaux lecteurs, malgré ces quelques réserves formulées.
Pierre- François Mary
* « Melun-Villaroche 1938-1972 – Essais et prototypes de l’aviation française », aux Éditions MDM en 1993. Une deuxième édition apparaît en 1999, avec le titre de la présente édition suivi de la mention « Essais et prototypes de l’aviation française », chez les Éditions du Puits Fleuri.
224 pages, 25 x 23 cm, broché
Plus de 300 photos