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J’étais un kamikaze

Édition annotée et présentée par Christian Kessler
Ryuji Nagatsuka

Ryuji Nagatsuka fait partie de ces kamikazés* qui ont, du fait du hasard, échappé à une mort programmée. J’étais un kamikaze ne se limite pas à l’expérience de l’auteur en tant que pilote-suicide : sa formation et son entraînement ne sont pas centraux dans le livre. C’est l’ensemble de son parcours depuis sa vie estudiantine en octobre 1943 à la capitulation du Japon en septembre 1945. En 340 pages, Nagatsuka nous narre non seulement le détail de son existence, mais aussi les vicissitudes de l’existence en temps de guerre dans un pays qui courait à la ruine. Ce témoignage s’avère d’une richesse conséquente et fait de J’étais un kamikaze un document majeur, voire indispensable, pour la compréhension de la société nippone de cette époque et du phénomène kamikazé*, encore souvent mal compris en Occident.

Qui dit témoignage dit subjectivité. Et ici, cette caractéristique, au lieu d’être inopportune, s’avère appréciable. Le lecteur assiste par exemple au lent glissement d’un point de vue nettement antimilitariste de l’auteur vers un engagement formel ultra-patriotique. Cette évolution présente un intérêt certain, celui de proposer, au fil de la lecture, deux points de vue opposés et complémentaires. Résumer ce livre à son titre J’étais un kamikaze serait particulièrement réducteur, tant l’ouvrage est d’une étonnante richesse. Après sa lecture, le lecteur aura nécessairement beaucoup appris sur le Japon de cette époque, et pas seulement sur le vécu de l’auteur. Le climat politique, la propagande, le quotidien de la population, la formation des pilotes, la structure des universités, les violentes brimades subies par les jeunes recrues, la militarisation à outrance de la société… on se demande ce qui pourrait manquer à ce livre d’une rare richesse.

J’étais un kamikaze fait partie des livre-clefs en ce qui concerne la Seconde Guerre mondiale et l’histoire de l’aéronautique. Paru initialement en 1972 chez Stock, il avait été rédigé directement en français (et un français de qualité !) par Ryuji Nagatsuka, citoyen japonais. Cette édition-ci, outre le prix très modique (9 € pour 346 pages !), présente un intérêt supplémentaire : il est présenté et annoté* par Christian Kessler, ce qui est un atout conséquent.

Christian Kessler, à qui nous devons l’initiative de cette réédition*, est l’auteur du remarquable Les kamikazés japonais dans la Guerre du Pacifique (Coup de cœur 2019). Spécialiste du Japon, il est l’un des rares historiens francophones à maîtriser le difficile sujet des kamikazés. Il consacre seize pages à une préface dont la nécessaire lecture fournit un éclairage bienvenu au livre de Ryuji Nagatsuka. Ajoutons à cela que les 340 pages* de ce livre essentiel sont d’une lecture agréable, et ce sans lourdeur.

Philippe Ballarini


320 pages, 10,8 cm × 17,7 cm, couverture souple
0,288 kg


* Le « é » final à « kamikazé » n’est pas une fantaisie de Christian Kessler. Il permet d’établir un distinguo avec les prétendus « kamikazes » terroristes qui entraînent des civils dans la mort, y compris femmes et enfants, quand les « pilotes-suicide » japonais attaquaient exclusivement des cibles militaires.
* Les notes, parfois conséquentes et toujours pertinentes, sont placées en bas de page, et non en fin d’ouvrage (où elles sont rarement consultées).
* L’édition originale était parue chez Stock en 1972
* En annexes : huit pages de statistiques des avions-suicides et des résultats.

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Éditions Perrin

ISBN 978-2-262-09695-3

9 €