Il s’appelle Richard de Winter. Et dès le début, il nous le dit : nous serions sans doute mieux lotis avec un autre héros. Car Richard n’est pas qu’un ingénieur brillant et pilote audacieux, membre de ce club de pionniers qui défrichent l’aviation au début du vingtième siècle ; il est également obstiné, cynique et potentiellement violent. Il est surtout décidé à prendre une revanche sur son destin de paraplégique et à dominer son adversaire pour, enfin, devenir l’unique roi du ciel.
Max Vier le dit : les beaux gosses à succès de la BD classique ne l’intéressent pas et les personnages ambigus, frustrés et désespérés lui paraissent plus réalistes. Avec King Richard, sa première bande dessinée, il a dû s’en donner à cœur joie : il signe un scénario noir au fil duquel chaque lueur d’espoir est éliminée au fur et à mesure que les ambitions démesurées du personnage le poussent dans l’impasse.
Sur le plan graphique, la passion de l’auteur pour le manga est évidente, de même que son sens de l’action : la mise en pages profite d’un dynamisme remarquable et l’assemblage même des vignettes fait partie de la narration — en particulier sur la superbe double planche 64-65, littéralement éclatée comme l’accident qu’elle représente. L’association d’un graphisme semi-réaliste européen avec un trait et une mise en pages japonaises donne un tout assez fort, qui colle bien à un scénario soigné et bâti comme une suite de chapitres : dans l’ensemble, Max Vier fournit un roman graphique où dessin et scénario se soutiennent mutuellement sans faiblir.
Certains lecteurs seront inévitablement décontenancés par certains aspects de l’histoire, qui repose sur des fondations historiques mais n’hésite pas à les trahir sans vergogne lorsque le besoin s’en fait sentir. D’autres haïront ce personnage central profondément antipathique, misanthrope et vindicatif. Mais les derniers apprécieront un récit noir, implacablement narré, dessiné avec violence et élégance, qui pioche efficacement dans les techniques européennes, japonaises et cinématographiques (la première vie de Maximilian von Vier) et parvient à trancher radicalement avec le reste de la production actuelle.
Franck Mée
Couleur par Andres
112 pages, 24 x 32 cm, relié couverture cartonnée
Avec l’aimable autorisation des © Éditions Paquet
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