Ce DVD produit par l’ECPAD comporte un film de 52 minutes qui retrace l’opération Bonite, conduite en mai 1978 par le 2e Régiment Étranger de Parachutistes à Kolwezi, au Zaïre, mais s’ouvre sur un bonus de 12 minutes, un passionnant historique des unités parachutistes de la Légion Étrangère. La Légion s’est en effet vu doter en 1948 de cette nouvelle composante opérationnelle, dont elle allait faire une formation d’élite. De l’Indochine à la Côte d’Ivoire, ce sont donc six décennies qui ont été traversées par des hommes dont le quotidien, comme le rappelle le narrateur, consiste à se trouver au cœur même des évènements qui agitent le Monde. Suez, l’Algérie, le Liban… Six décennies de gloire et de larmes.
Puis vient la relation de l’opération Bonite, vue « de l’intérieur ». À la fin des années soixante-dix, Kolwezi, ville de 180 000 habitants, était le lieu où résidaient les familles des employés de la mine toute proche de Metal Shaba, exploitée par Gecamines. La plupart des Européens de la région y travaillaient. Kolwezi se trouve dans la province du Shaba, l’ancien Katanga, tout au sud de l’actuelle République Démocratique du Congo (ex Zaïre), près de la frontière angolaise. Une ancienne colonie belge, dont le sous-sol renferme d’énormes gisements de cuivre, du cobalt, de l’uranium, du fer… De quoi attiser bien des convoitises.
Le 13 mai 1978, près de 4000 « Katangais » du FLNC * venus d’Angola envahissent la ville et se livrent au pillage. De nombreux Européens sont assassinés, d’autres sont emmenés en otages par dizaines… La situation est confuse. On sait que la majorité des rebelles quittent Kolwezi assez vite après l’avoir pillée, à bord de véhicules volés, mais aussi que plus de 500 d’entre eux, bien armés, encadrés par des Cubains, restent sur place et détiennent des otages. Plusieurs milliers d’Européens, dont quelque 400 Français, sont en danger. Les zaïrois sont dépassés, Mobutu demande l’aide de la Belgique, de la France et des USA. Les Américains ne souhaitent pas intervenir directement, et en Europe deux logiques émergent : devant l’évidente gravité des évènements, Paris milite pour l’action sans attendre, mais Bruxelles penche pour laisser à la diplomatie le temps de tenter la discussion. Il faut dire que les Belges, dont les ressortissants sont majoritaires à Kolwezi, ont été durement marqués par « l’affaire » du Katanga, quinze ans plus tôt. Les forces des deux pays interviendront donc distinctement. Le mardi 17 mai au matin, le 2e Régiment Étranger de Parachutistes, qui était en alerte depuis la veille à 3 heures, quitte son casernement de Calvi sous le commandement du colonel Philippe Erulin. Destination Kinshasa et la préparation finale de l’opération, avant d’embarquer dans les avions zaïrois. Mission : sauter sur Kolwezi, sécuriser la ville et permettre l’évacuation des Européens.
Après de nombreuses péripéties, la première vague de 405 légionnaires est parachutée le 19 mai à 14h30 et engage le combat immédiatement. Les légionnaires font merveille : malgré de durs engagements, les objectifs assignés sont sous le contrôle des soldats français à 18h le jour même, et les accrochages se poursuivent toute la nuit. Au lever du soleil, le reste du REP est largué et s’assure des objectifs désignés en quelques heures. Les évacuations commenceront le lendemain, gérées par les paras-commandos belges sur l’aérodrome local.
Militairement, cette opération est emblématique du combat parachutiste et de l’esprit légionnaire. Mais on en retiendra aussi les 2600 Européens tirés d’un très mauvais pas, 170 civils européens et 5 légionnaires tués par les « Katangais », lesquels ont perdu 250 hommes dans les combats. Kolwezi, c’est une cicatrice dans la vie de ceux qui ont été tirés de là par les légionnaires parachutistes, et une fierté de plus pour cette unité d’élite.
Le DVD rend principalement compte de l’action du 2e REP, en faisant intervenir une petite dizaine d’acteurs de la mission, avec le support d’images d’archives : journaux télévisés, extraits de films d’époque, photos… Par contre, les aspects politiques n’y sont que survolés ; en outre, il n’y a qu’un seul témoin civil, intervenant un peu comme un fil rouge… Si l’on souhaite avoir une idée plus complète de ce qu’a été l’affaire de Kolwezi, il est souhaitable de compléter ce visionnage par celui de l’autre DVD produit sur ce sujet par l’ECPAD : Chronique d’une prise d’otages.
Philippe Boulay
– Réalisation : Éric Beauducel
– Durée du film : 52min
– DVD vidéo / Dolby Digital / Pal 4:3 / Toutes zones/compatible stéréo
* Front de Libération Nationale du Congo. Le nom « Katangais » fait référence au conflit sauvage qui opposa au début des années soixante l’armée de Joseph Mobutu à des troupes issues de la gendarmerie katangaise, levées par le leader sécessionniste Moïse Tschombé et commandés par des mercenaires européens (Bob Denard, Jean Schramme…) Un conflit déjà marqué par l’action en sous-main des pays occidentaux, très intéressés par les énormes ressources locales.