Dans sa page de conclusions, l’auteur rappelle à quel point l’histoire de la Kampfgeschwader 100 fut « biscornue et confuse ». Et ce n’est pas peu dire : d’unité spécialisée, l’escadre fut à plusieurs reprises engagée dans de très classiques missions de bombardement, passant de la Pologne au Royaume-Uni, sortant des rigueurs hivernales du Front de l’Est au théâtre d’opérations méditerranéen, voire africain, avant un retour en France, ceci n’étant qu’un aperçu très sommaire du parcours erratique et décousu de la KG 100. La complexité de cette histoire rend louable la tâche de Jean-Louis Roba, qui a su démêler l’écheveau pour nous le rendre accessible et compréhensible.
Après une dizaine de pages narrant les origines du Kampfgruppe 100* (future Kampfgeschwader 100*), nous entrons le vif du sujet avec des missions sur la Pologne et la Mer du Nord, puis sur la Norvège, ainsi qu’une participation au Blitz sur l’Angleterre, avant une « réorientation » en direction de l’URSS au moment de l’opération Barbarossa.
L’escadre fut partagée en quatre Gruppen* intervenant sur des théâtres d’opérations différents (Caucase, Mer Égée, Afrique du Nord, Europe de l’Ouest, URSS, Italie, Roumanie…) avec des missions variées, le plus souvent éloignées des la vocation première de l’unité. On notera l’utilisation, en 1943, de la bombe guidée Fritz X, en particulier lors de la destruction du cuirassé amiral de la flotte italienne, le Roma.
Soulignons à nouveau le mérite de l’auteur à exposer de façon claire et ordonnée ce qui paraît au premier abord un embrouillamini confus. Chaque chapitre, développé de manière chronologique, est assorti d’une conclusion de l’auteur. On laissera à celui-ci sa vision de l’impréparation du IIIe Reich à la guerre (p.16, p.75…) et on reconnaîtra la qualité de son travail de recherches et de mise en ordre. L’ouvrage est servi par une iconographie riche et choisie (on aurait néanmoins aimé que soient présentes davantage de cartes), dans laquelle figurent, parmi de nombreuses photos inédites, les incontournables profils (en pleine page) signés Thierry Dekker. Cette étude ne pouvait être démunie d’annexes, ici tout à fait indispensables : dates principales, pertes matérielles connues (10 pages détaillées), liste des Ritterkreuzträger*, liste alphabétique du personnel, et l’indispensable organigramme de la KG 100. Peut-être des lecteurs pas encore rompus aux arcanes de l’organisation de la Luftwaffe auraient-ils apprécié une notice explicative leur évitant de se perdre, par exemple, entre les KGr.* et les KG*. Précisons par ailleurs que le texte de l’auteur est enrichi d’extraits de témoignages.
Ce numéro 1 de la nouvelle collection « Histoire des unités », Lela Presse augure bien de la suite. Cette histoire de la KG 100, parfois présentée comme confuse et « inracontable », nous est exposée ici avec clarté. Le livre est aux standards exigeants de Lela Presse. On notera une couverture souple, ceci vraisemblablement afin de proposer à un prix abordable les ouvrages de cette prometteuse série, mais on remarquera en contrepartie un excellent papier glacé de fort grammage.
Philippe Ballarini
NDLA : Un lecteur sourcilleux ne manquera pas de sursauter à certains passages. Par exemple à la page 16 où Hitler semblant bien pacifique, il eût peut-être mieux valu qu’en 1939 la France et le Royaume-Uni le laissent sagement « régler militairement ses nombreux contentieux avec une Pologne très revendicative ».
224 pages, A4, couverture souple
1,218 kg
– Collection Histoire des unités N°1
– Les autres ouvrages de la collection Histoire des unités
* Kampfgeschwader / Geschwader = KG : escadre
* Kampfgruppe / Gruppe = KGr : groupe
* Ritterkreuzträger : littéralement « Porteur de la Croix (de Fer) de Chevalier »
Avec l’aimable autorisation de
© Lela Presse
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