Tout le monde connaît Gustave Eiffel pour ses constructions métalliques dans les bâtiments, avec notamment sa tour parisienne, le viaduc de Garabit, ou encore l’infrastructure de la statue de la Liberté, mais qui se souvient qu’il fut également un pionnier de l’Aviation ? Pourtant, son rôle fut important, surtout grâce à la soufflerie qu’il installa au début du siècle dernier près du Champ-de-Mars, qui permit à de nombreux pionniers d’explorer efficacement l’aérodynamique et de perfectionner leur avions.
Les éditions Lavauzelle mettent à notre disposition une réédition luxueuse de l’une des publications réalisées par le célèbre ingénieur, relatant certains résultats obtenus dans cette fameuse soufflerie. Il s’agit de la seconde édition, initialement parue en 1911. L’épaisse couverture cartonnée abrite une reliure digne des bibliothèques à l’ancienne, avec un imposant ouvrage sur papier épais, imprimé avec les caractères d’époque, de nombreuses tables et les dessins techniques typiques. Quelques rares photos enrichissent également l’ouvrage par des vues des installations laboratoires. Autant le dire tout de suite, cela n’a rien d’un roman et la lecture de cet ouvrage hautement technique n’est pas vraiment faite pour relaxer l’intellect.
L’ouvrage est essentiellement découpé en trois parties, agrémentées d’imposantes annexes très techniques. Le premier chapitre présente les installation de la soufflerie Eiffel. Au travers de ces pages d’explications détaillées, entrecoupées d’équations désuètes, Eiffel égrène les calculs qui lui ont permis de mettre à disposition des inventeurs, un remarquable outils de mesure et d’analyse, qui contribua à l’efficacité des progrès fulgurants de l’Aviation française. Le second chapitre fournit des tables de mesures de référence des efforts aérodynamiques, appliquées à des formes élémentaires, afin d’établir des bases de comparaisons et des abaques pour les expériences. Enfin, le troisième chapitre entre dans le vif du sujet avec quelques résultats obtenus sur des profils d’ailes. Parmi les exemples illustrant ces données brutes, figurent quelques aperçus plus concrets, sur des monoplans de Robert Esnault-Pelterie et de Nieuport, ou encore des biplans Wright, Voisin, Farman, Breguet… Les annexes présentent d’ailleurs quelques comparatifs de profils à la cambrure caractéristiques de cette époque encore très empirique. Une série de dessins présente également quelques appareils aux formes originales, parfois connues comme avec la célèbre torpille de Tatin et Paulhan, mais parfois plus étonnantes encore, comme l’étrange projet de monoplan Letellier-Bruneau.
Un ouvrage difficile, mais à la richesse historique et technique incontestable. Cette édition trouvera sa place, soigneusement rangée bien en vue sur les étagères, et sa consultation occasionnelle ne manquera pas de rappeler les conditions dans lesquelles l’aviation a grandi, au milieu d’un fourmillement d’idées étranges, progressivement étudiées avec méthode et formalisées avec rigueur, avant d’aboutir à ce qui est devenu pour nous des évidences, mais qui nous auraient complètement échappé sans le travail acharné et pointilleux de quelques grands personnages, dont fait partie Gustave Eiffel.
Philippe Ricco
(330 pages, format 210 x 297 mm, relié, dos cuir)
Ouvrage édité en 1911
Cet ouvrage fait partie de la collection
La guerre aérienne : la pensée préservée.