Si les guides et manuels de météorologie destinés aux pilotes sont nombreux, cet aéro-manuel rédigé par Arnaud Campredon va être apprécié de façons très différentes par les pilotes, selon leur origine et leurs pratiques. Mais autant vous le dire tout de suite, personnellement, j’ai adoré. Je pense que ce sera le cas des pilotes « voiliers », vélivoles, libéristes (deltistes et parapentistes), ulmistes (une partie, ceux qui ont des grandes ailes et un moteur qui a tendance à s’arrêter par beau temps), et des pilotes de montagne pour ce qui est des pousse-manettes. Peut-être même des aérostiers, car l’auteur pense à eux à l’occasion, et des aéromodélistes.
Arnaud Campredon est en effet non seulement ingénieur-prévisionniste à Météo-France, mais aussi pratiquant de plusieurs de ces disciplines. Il nous présente donc une méthode de découverte et d’apprentissage de la météo directement inspirée de son expérience en vol ou ce celles qu’il a recueillies. Si le scientifique veille, il sait s’effacer derrière le pédagogue lorsqu’il le faut. De façon générale, l’auteur va partir du plus petit, les éléments locaux dont va avoir besoin le pratiquant pour décoller et se poser en sécurité, puis à une échelle un peu plus large pour optimiser son vol, pour aller vers le plus vaste, les systèmes frontaux à l’échelle du globe, à l’origine du « temps qu’il va faire », celui qui intéresse aéronautes, marins, alpinistes, touristes et agriculteurs. C’est donc l’inverse de ce qui est enseigné habituellement, mais l’effet explicatif est saisissant, d’autant plus que l’auteur utilise la première personne du singulier pour nous présenter sa méthode, et n’oublie pas de panacher son texte de multiples schémas et illustrations, de recettes de cuisine simples, de moyens mnémotechniques et de petites sentences amusantes, comme le ferait un orateur pour capter et garder l’attention de son public. Il s’écarte parfois du cœur de son sujet pour nous présenter les domaines connexes directement touchés par les caractéristiques de l’air : altimétrie, anémométrie, barométrie, effets sur la navigation, visibilité, sécurité en vol. Et comme il le fait bien, toujours de manière didactique, on apprécie.
Le guide se termine sur un paragraphe consacré aux modèles numériques, aux sites Internet et aux dossiers météo, puis sur un glossaire qui est le bienvenu.
Pour le public-cible, adepte de tous les sports aériens vélivoles, cet aéro-guide est un véritable couteau suisse, à la fois pour acquérir des notions de bases de météorologie puis pour améliorer ses connaissances par de multiples analyses en détail de toutes les formes d’ascendances, de leur évolution dans le temps, de leurs interactions, etc. Et pour revenir au public qui sera peut-être moins séduit au premier abord, les pilotes d’avions et d’ULM rapides, moins demandeurs de ce niveau d’excellence dans la connaissance et la détection des thermiques, cet ouvrage pourrait être pour eux la base d’un perfectionnement et d’un enrichissement post-brevet.
Comme la plus belle des mariées a toujours un petit défaut, il faut ici bien s’accrocher pour en trouver (*), et encore sont-ils vraiment si minimes que cela laisse deviner le niveau d’excellence de cet aéro-manuel : quel auteur nous avait parlé jusque là des brises de glacier ?
À conseiller chaudement, ce sera loin de jeter un froid !
Jean-Noël Violette
(*) NDLA :
– Quand on aborde les brises de vallée (chapitre 23.3), on pourrait ajouter les conflits de brises, quand une brise montante ne peut s’établir car recevant en cataracte la retombée d’une brise plus forte en amont d’un col (exemple : secteur de Monétiers-les-Bains avec la descente d’air venant du col du Lautaret).
– Il manquerait, parlant des brises de glacier (chapitre 22.3), l’idée d’un front entre la descente d’air froid associée et la brise montante s’établissant dans la journée. Ce front très violent et se déplaçant à vue d’œil en début d’après-midi en regardant son effet sur les herbes hautes, est par exemple assez caractéristique en Valais.
– Pour ce qui est des vents régionaux, l’effet de la Bise sur les Alpes du Nord aurait pu être développé, et il manque au moins la Lombarde, sa cousine, équivalent encore plus Est soufflant sur Maurienne, Queyras et Ubaye.
– « Foehn » n’est pas le nom d’une vallée autrichienne (page 255), mais le nom du vent de Sud chaud soufflant sur les Alpes suisses et autrichiennes. En Suisse romande, c’est aussi la dénomination d’un sèche-cheveux, par analogie.
– Pour le vol d’onde, certains grands spécialistes et puristes diraient qu’il manque la notion de saut hydraulique, donnant un effet quasi similaire mais avec une nébulosité différente en aval du flux.
Sommaire :
– Introduction
– I. Première partie : L’atmosphère
– II. Deuxième partie : La convection
– III. Troisième partie : La turbulence
– IV. Quatrième partie : Quel temps fait-il ?
– Conclusion
– Bibliographie
– Glossaire
– Table des matières
320 pages, 17 x 24 cm, couverture souple, broché
Validé par Météo France