L’Océanie… Cette France des antipodes symbole de la douceur de vivre et des paysages paradisiaques. Un utile préambule rappelle – voire instruit – le lecteur sur l’histoire de ces terres, notamment les siècles depuis les premiers contacts avec les Occidentaux, sans oublier les évènements propres à ces peuples. La mythologie et la symbolique de l’oiseau sont également exposées, elles qui y tiennent une place si singulière.
Bien sûr, il y eut des siècles de marine à voile avant que le premier aéroplane ne vienne fendre les airs. Mais ce premier survol avait été devancé de près deux décennies par des initiatives appelant et anticipant l’activité aérienne comme le rappelle l’auteur. En retrouvant ces documents et en ayant soigneusement compilé au fil des décennies les récits des témoins comme des acteurs, Marcel Bauer avait matière. Il a su la coucher sur le papier de belle façon, rapportant également le contexte, les moyens, les hommes (qu’ils soient décideurs ou ceux armant les avions, au sol comme en vol). Et par quelques illustrations simples, il souligne la hardiesse de cette entreprise sur une zone géographique vaste comme l’Europe mais où les posers ne se font que sur les sommets presqu’immergés de lieux aussi épars que ne le sont les capitales et principales villes européennes.
De façon vivante car richement illustrée par les albums des personnels, le moindre vol exploratoire est évoqué ainsi que les balbutiements de l’aviation civile. Quand survint la seconde Guerre Mondiale … Le bouleversement est immense pour ces terres aux antipodes qui renoncent à la défaite car n’ayant pas vécu la Blitzkrieg, elles n’en comprennent pas le knock-out. Ce sera le moteur du ralliement à la France Libre et à l’engagement de ces français outre-marins qui partiront sous tous les cieux servir les ailes françaises et dont les parcours sont minutieusement rapportés. Pendant que les Alliés viendront établir les infrastructures de la reconquête alors que les ailes allemandes et japonaises par leurs survols ont fait craindre le pire. Polynésien de cœur et y résidant depuis le milieu des années soixante, Marcel Bauer a cette plume qui modestement mais justement permet au récit de suivre toutes les phases de cette suractivité avant que le soufflé ne retombe avec les années de paix. Mais la technologie -comme l’Histoire- se n’arrête jamais : au bénéfice des infrastructures laissées et des surplus de guerre, les premiers services aériens réguliers se mettent en place. Ce trop court dernier chapitre ferait presque l’amorce chronologique d’un autre ouvrage de l’ARDHAN auquel M. Bauer a contribué : L’Aéronautique Navale au C.E.P. (mais ce dernier est limité au seul domaine militaire).
Néanmoins, à la fermeture de ce livre, on est reconnaissant à l’auteur de nous avoir présenté de façon si plaisante cette longue histoire commençant bien avant 1925. Car à côté des nombreuses annexes synthétisant les lieux, dates et chiffres, il a su refléter de façon très humaine une belle entreprise qui aurait pu sombrer dans l’oubli sans la collaboration de ces nombreux pionniers qui lui ont largement ouvert leurs albums privés. Qu’attendez-vous pour vous laisser emporter par les alizés du Pacifique ?
François Ribailly
224 pages A4, 346 photos N&B et couleur, 8 cartes et 13 profils