Connaissez-vous les films de Robert Enrico ? Vous savez, ces films virils qui fleurent bon l’amitié, l’Aventure avec un grand « A », les rencontres, la confiance, la solidarité…
L’histoire de Jean-Claude Brouillet dépasse en ces domaines tous les scénarios que l’on peut imaginer. Et l’Avion du Blanc, c’est le récit de cette histoire. Celle d’un pilote fraîchement formé à la fin de la Seconde Guerre mondiale, qui décide de lancer à partir de rien une compagnie aérienne au Gabon, qui se démène pour que des pistes soient créées, qui fait prospérer cette société devenue Transgabon et qui aura fait fortune à 35 ans pour repartir alors vers de nouvelles aventures. Des aventures (L’African Queen, Corsair, etc.) impossibles à résumer en quelques lignes, et que vous aurez de toutes manières beaucoup de plaisir à découvrir lors de cette lecture.
L’ Avion du Blanc, c’est également pour moi une autre histoire.
Si la première édition de ce livre chez Robert Laffont date de 1972, il en a été édité une version « J’ai Lu – Leur Aventure » deux ans plus tard.
À l’aube des années quatre-vingts, l’étudiant désargenté que j’étais ne manquait jamais de s’arrêter une fois par semaine, sur le chemin de la fac, à la devanture d’une petite librairie. Dans un coin, un carton de livres d’occasion attendait l’acheteur. Il faut dire que la librairie les rachetait 50 centimes pour les revendre 1 Franc, ce qui n’était pas cher, même sans les rapporter respectivement aux 0,07 € et 0,15 € correspondants de nos jours… J’avais déjà déniché dans ce carton, au fil des semaines, quelques livres d’aviation quand je suis tombé un jour sur l’Avion du Blanc en édition J’ai Lu.
Je fus tout de suite conquis par ce livre, non seulement pour les aventures extraordinaires qu’il racontait, mais aussi pour le style si agréable de l’auteur.
Deux ans plus tard, j’eus la chance de poursuivre mes études dans une école très tournée vers l’international, avec des condisciples venant de Singapour, de Madagascar, du Maroc, de Tunisie… et du Gabon.
Du Gabon ? Je commençai à discuter avec eux de ce livre. Pour les copains gabonais, ce livre était une espèce de Graal car il était introuvable chez eux, où par contre l’empreinte de Jean-Claude Brouillet était toujours très présente… et sa cote d’amour très élevée.
Aux vacances suivantes, j’amenai le livre. Ils me proposèrent de me l’acheter, et bien entendu je refusai ; je n’avais pas tant que ça de livres d’aviation. Ils firent monter les enchères, me proposant plus de 300 fois ce qu’il m’avait coûté. Là, si je refusais encore, c’est que cela devenait indécent : je n’en avais pas parlé pour les arnaquer, pas plus que je ne l’avais acquis pour faire un placement. J’aurais préféré de loin en posséder deux pour leur en offrir un exemplaire !
Avec les années, nous nous sommes perdus de vue.
Avec les années, j’ai tout d’abord pu trouver d’autres exemplaires, notamment de la version originale de 1972.
Et avec les années, le destin s’est glissé dans la partie, avec l’excellente idée qu’a eue l’éditeur LVE (Le Voyageur Éditions) de lancer en cette année 2011 une version revue par l’auteur de ce livre devenu introuvable.
Au point de vue des nouveautés, on trouvera par exemple une carte et quelques photos. La plupart des photos sont toutefois celles de la première édition (en noir et blanc bien sûr) et ont perdu au passage un petit peu en définition, car les négatifs originaux n’ont sans doute pas dû être réutilisables. Elles restent cependant correctes.
On trouve également un dernier chapitre ajouté en annexe, apparemment retranscrit par un tiers (Jean-Claude Criton) à partir d’entretiens avec l’auteur.
Tout le monde, en France comme, entre autres, au Gabon, pourra désormais y avoir enfin accès. Alors ne vous en privez pas, c’est vraiment une superbe aventure à lire… et un jour cette édition-là sera à son tour épuisée !
Jean-Noël Violette
372 pages, A5 (14,8 x 21 cm + photos
PS : Et si par la magie d’Internet deux amis au Gabon, Dominique et Jean, tombent sur cette recension, qu’ils sachent qu’elle a été écrite en pensant bien amicalement à eux.