Fans de Jean-Michel Charlier, réjouissez-vous : c’est l’année pour le retrouver. Après la première partie des Oiseaux noirs, poursuite du Buck Danny qu’il était en train d’écrire lors de son décès, voici l’adaptation en bande dessinée de l’unique roman de la série Tanguy et Laverdure : l’incontournable L’avion qui tuait ses pilotes, paru en 1971 aux éditions Hachette.
C’est Patrice Buendia qui s’est chargé de l’adaptation. Restant très fidèle au matériau d’origine, il n’a pas eu de peine à retrouver le ton du maître : des dialogues plutôt écrits, quelques planches un peu chargées, des passages au suspense haletant, et bien entendu des rebondissements parfois quelque peu invraisemblables, notamment à l’approche du dénouement. Notons également que Buendia a fait le choix de laisser en l’état certaines approximations de l’époque (notamment le fait que le Mirage F2 est présenté comme la version biplace, alors qu’il s’agissait d’un appareil totalement différent), ce qui pourrait faire grincer quelques dents chez les puristes.
Si Durand s’est clairement inspiré d’Uderzo,
il a su opportunément dynamiser et moderniser le trait.
Aux pinceaux, nous retrouvons Matthieu Durand, habitué des séries aéronautiques et maîtrisant des styles très différents, du très moderne Rafale Leader aux classiques semi-réalistes Airblues, et qui a su se glisser avec talent dans les traces d’Éric Loutte pour alterner avec lui les Team Rafale. Cette fois, c’est sans vergogne sur les pas d’Uderzo qu’il se lance, avec un trait élégant reprenant formes et proportions du maître. Il a toutefois modernisé quelque peu certaines compositions, en particulier dans les séquences aériennes, pour obtenir un remarquable équilibre entre fidélité et dynamisme.
Si nous voulions pinailler, nous noterions tout de même que cela pose un problème chronologique : contemporain du diptyque Les vampires attaquent la nuit / La terreur vient du ciel, ce scénario centré sur le Mirage F1 trouverait logiquement sa place juste avant eux, donc en plein milieu d’albums dessinés par Jijé, à une époque où celui-ci avait déjà bien installé son propre style, avec de généreux aplats d’encre et un Laverdure au profil bien plus tendu que chez Uderzo.
Mais ne boudons pas notre plaisir : l’association du style de Charlier (à peine remanié) et de la bible graphique d’Uderzo (subtilement modernisée) donne une paire d’albums élégants et efficaces, menés de mains de maîtres et fort agréables à lire. Voilà donc deux nouveaux incontournables pour les amateurs de la « période Charlier » des aventures de Tanguy et Laverdure.
Franck Mée
48 pages, 23,3x 31,3 cm, couverture cartonnée
– Les albums de la série Tanguy et Laverdure Classic
Avec l’aimable autorisation des
© Éditions Dargaud