La fin des années 30, les bruits de bottes à la frontière rhénane et les bruits de canons au-delà des Pyrénées, les peurs et les espoirs du peuple juif, les exacerbations politiques qui peuvent aussi s’exprimer à visage bien couvert, la fin de l’épopée de “la Postale” avec la mort récente de Mermoz, pour la France, l’heure des choix va bientôt sonner.
Mais tout ce petit monde, encore un peu insouciant, est réuni à un meeting aérien comme on savait le faire à l’époque, mélange de compétition, de jeux du cirque et de kermesse familiale. A l’issue des présentations en vol, un gala est organisé “toutes médailles dehors, le bal des Breloques” et l’aventure peut commencer pour le héros Philippe de Turenne Bretenoux de Linac, dit “Philac”, aviateur noble désargenté, héros de guerre dans des conditions bien secrètes. Ce bal va être le déclenchement de rencontres successives, de prise de conscience, et vont bouleverser son destin à travers un périple aussi périlleux que trépidant à bord de son Bucker, pas de hasard, l’auteur en a aussi épousé un.
En mélangeant la grande histoire et la toute petite, en racontant les aventures de son héros, Jan Tutaj nous plonge non seulement dans l’ambiance d’une époque, mais aussi dans son style littéraire tant ce roman semble être un feuilleton publié à l’époque. On est aussi très proche de l’esprit des aventures de Boro reporter photographe (Franck & Vautrin) ce qui est une référence en la matière ou bien des aventures de Biggles. On y croise aussi Kessel, Mermoz, Saint-Ex, De Gaulle et un directeur de la sûreté qui n’est pas sans rappeler un autre commissaire de la littérature populaire, il n’y a pas de hasard non plus.
Irrévérencieux, rythmé, ce premier roman, n’a aucune autre prétention que de divertir, il y parvient aisément tout en nous donnant une vision effrayante et drôle de l’histoire à travers un tout petit bout de lorgnette. Il reste un petit suspens bien ténu tant on sait bien où veut nous mener l’auteur, mais voyez-vous, on n’a qu’une seule envie : y aller et on en redemande… vite ! et tout s’enchaîne avec plaisir jusqu’à l’énorme clin d’œil final.
On notera le travail soigné de l’éditeur qui nous propose en plus du texte enjoué quelques illustrations au trait de Frédéric Dubac qui rendent ce livre particulièrement agréable. Avec ce troisième livre en moins d’un an, Tutaj montre qu’il est un auteur particulièrement prolifique, capable de jouer sur plusieurs styles, à se demander quand il a le temps de piloter ses avions…
Frédéric Marsaly
224 pages, couverture souple