Le courrier doit passer !


L’aventure de l’Aéropostale
Gérard Piouffre

Ballons, pigeons, dirigeables acheminent les premières missives jusqu’à ce que les avions s’en mêlent : le 18 Février 1911, le français Henri Pequet porte le premier courrier officiel « par avion » sur une distance de 10 km, aux Indes Britanniques. Le service postal par avion prend vraiment son essor après la Grande Guerre assurant progressivement des désertes sur la France, l’Europe, l’Afrique… Le premier vol transatlantique, le 29 juin 1927 du Fokker trimoteur America entre New York et Paris se termine en amerrissage forcé sur les côtes du Calvados. Les longues traversées maritimes restent assurées par bateaux. Dans ces conditions, il faut cinquante jours pour acheminer une lettre en Amérique du Sud et recevoir une réponse. Pierre Georges Latécoère qui a créé en 1919 une compagnie aérienne reliant la France au Maroc et au Sénégal depuis Toulouse, puis plus loin, a l’ambition de diminuer ces temps de transport par trois. L’usine de construction d’avions qu’il dirige à Montaudran va l’aider dans cette ambitieuse tâche ainsi qu’une équipe de passionnés qui, après guerre, ont encore envie d’en découdre avec l’adversité, cette fois à des fins pacifiques, simplement pour que le courrier passe.

Le courrier doit passer ! de Gérard Piouffre nous livre leur histoire étonnante, celle des Lignes aériennes Latécoère, devenues Aéropostale en 1927.
Il relate dans les moindres détails toutes les péripéties de cette aventure humaine et commerciale hors du commun où des êtres exceptionnels surmontent toutes les difficultés. Ils règlent les délicates questions techniques, négocient avec les gouvernements le survol des territoires, affrontent de détestables conditions météorologiques occasionnant de nombreux crashs, et luttent en plein désert contre des tribus hostiles. Il arrive fréquemment qu’un moteur en surchauffe oblige un Breguet 14, en route vers Dakar, à se poser en catastrophe dans le Río de Oro où l’attendent les guerriers Maures. Certains pilotes sont capturés et libérés contre rançon, d’autres sauvagement assassinés…

Il faut aussi contrer la concurrence, obtenir subventions et financements et recruter du personnel dont le remarquable Didier Daurat, qui ouvrira la première ligne sur l’Afrique le 1er septembre 1919, en Breguet 14. Directeur de l’exploitation, il embauchera Mermoz, Saint-Exupéry, Reine, Guillaumet dont l’atterrissage forcé du Potez 25 en pleine montagne andine, le 13 juin 1930, est une grande leçon de courage. Une marche harassante de plusieurs jours dans une montagne gelée aux multiples pièges l’amènera à bout de forces dans une vallée argentine où il sera secouru par des paysans. « Ce que j’ai fait, aucune bête ne l’aurait fait » confiera-t-il à son ami Antoine de Saint-Exupéry, tant sa survie tenait du miracle.

L’Aéropostale rachetée et dirigée par le riche entrepreneur Marcel Bouilloux-Lafont devient une entreprise florissante. Le courrier franchit l’Atlantique Sud mais aussi la Méditerranée, de Marseille à Alger, où hydravions et avions sont si peu fiables qu’ils nécessitent une flotte de bateaux d’assistance et de secours. Le crash boursier de 1929 lui plombe les ailes et l’amène au dépôt de bilan. Victime d’un faussaire qui fait croire au complot et casse la dynamique d’un groupe jusque là soudé, la compagnie se perd dans des rivalités internes. Daurat calomnié est licencié, Beppo de Massini, le dynamique directeur général, démissionne comme d’autres. En 1933, sous l’impulsion du jeune ministre de l’air Pierre Cot, l’Aéropostale fusionne avec d’autres sociétés de transport aérien pour former la toute nouvelle compagnie nationale Air France. « L’ Archange » Mermoz disparaît aux commandes du Laté 300 la Croix-du-Sud, le 7 décembre 1936 sur l’Atlantique Sud. L’époque héroïque se termine avec lui, mais pas la grande épopée de la Postale…

Cette saga des précurseurs du transport aérien moderne, dont les chantres furent Joseph Kessel et Antoine de Saint-Exupéry, est ici racontée comme un roman d’aventure dont on tourne les pages avec délectation. Assurément, une très bonne lecture de vacances !

Richard Feeser


288 pages, 158 x 230 mm, couverture souple

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ISBN: 978-2-03-583355-6

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