Laurent Obertone, auteur à la réputation sulfureuse depuis son essai coup de poing La France orange mécanique sur la délinquance dans notre pays, est aussi capable de s’emparer d’un fait divers et de l’exploiter de façon romanesque comme il l’avait fait dans Utøya, racontant le massacre commis en 2011 par le tueur d’extrême-droite Breivik.
Il applique le même principe pour ce livre, écrit à la première personne. Mais cette fois-ci, Obertone ne se place pas du côté du criminel : il se glisse dans la peau d’un enquêteur du Bureau d’Enquête et d’Analyses (BEA) appelé en urgence près de Digne lorsqu’un Airbus A320 de la compagnie Germanwing disparaît, le 29 mars 2015.
L’enquêteur découvre alors l’ampleur du drame au milieu des décombres et prend conscience qu’il lui faudra expliquer cet évènement au monde et aux familles et, en poursuivant son enquête, réalise que ce n’est pas un accident.
Le « diable du ciel » était aux commandes de l’Airbus et a commis un acte fou. L’enquêteur va se lancer à la poursuite du souvenir de Lubitz pour essayer de comprendre comment il en est arrivé là et comment personne n’a pu se mettre en travers de sa route et de ses atroces desseins.
On peut aborder les catastrophes aériennes de façon technique et purement aéronautique comme le font de nombreux auteurs. On peut aussi s’en emparer et les traiter sur un ton plus littéraire. Pourtant, et ce n’est pas là la moindre des surprises de ce roman particulier, il est extrêmement bien documenté, l’auteur ayant, de toute évidence, rencontré un ou plusieurs enquêteurs du BEA impliqués dans ce dossier, tant les détails, même les plus techniques, sonnent juste.
Bien sûr, on pourra s’interroger sur l’analyse psychologique que brosse l’auteur du pilote criminel, mais l’ensemble du récit qu’il déroule se tient. On ne trouvera guère de révélations sur le copilote, son dossier médical et ses motivations, ces points ayant déjà été maintes fois traités et évoqués, mais la mise en scène permet des mises en perspective pertinentes. Surtout, il humanise comme rarement, les fameux enquêteurs du BEA dont le rôle est toujours déterminant dans ces affaires.
Cet accident, particulièrement marquant pour ses circonstances abominables — on parle d’un suicide accompagné de l’assassinat programmé de 149 autres personnes ― donne l’occasion à Obertone de livrer un roman honnête, bien documenté qui, bien que loin d’être inoubliable, peut être qualifié de fréquentable.
Frédéric Marsaly
350 pages, 14,2 x 22,1 cm, broché
0,375 kg