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Le temps des ingénieurs de la navigation aérienne

Mémoires d’outre-mer 1945-1968

Lorsque la paix rouvre se ailes en 1945 et que les perspectives d’expansion du transport aérien semblent sans limites, la France ne dispose pour assister les pilotes que d’opérateurs radio et de commandants d’aérodrome – aidés de météorologistes – qui ont été formés avant la guerre, en un temps où malgré les quelques messages d’information sur le trafic aérien proche qu’ils commencent à recevoir, les dits pilotes étaient encore largement livrés à eux-mêmes, ne pouvant compter que sur quelques feux aéronautiques et encore moins de stations de radiogoniométrie.
La nouvelle organisation de la circulation aérienne qui se met en place, grâce en particulier aux progrès réalisés par les Alliés, ne peut se satisfaire de ces deux seules qualifications techniques, et il est donc décidé en 1948 de créer dans notre pays un nouveau corps d’Ingénieurs de la Navigation Aérienne, dont le titre est délivré à ces précurseurs comme au jeunes élèves sortant de l’École Nationale de l’Aviation Civile crée par la même occasion. C’est à eux que ce livre est consacré, venant compléter son prédécesseur qui rassemble des souvenirs de tous les métiers de l’Aviation civile.

Il suffit de relire les souvenirs de Raymond Vanier consacrés à la naissance de la Postale de Nuit pour comprendre l’état de sous-équipement dans lequel se trouve la métropole au sortir de la guerre en matière de radionavigation, mais les territoires d’outre-mer qui nous intéressent ici, sont encore plus démunis.

À sa plus grande extension, l’empire colonial français fut essentiellement africain et il n’est donc pas surprenant de voir ce continent occuper une place de choix dans cette évocation de l’activité des services de la navigation aérienne hors de la métropole au cours du quart de siècle qui a suivi la fin de la deuxième guerre mondiale.

Si la frange littorale de l’Afrique du Nord a connu avant guerre un début d’équipement comparable à celui de la métropole, l’Afrique saharienne et subsaharienne est un territoire presque vierge mais aux perspectives de développement prometteuses, d’autant plus que l’avion semble le plus apte à pallier à l’absence de voies de communication terrestres modernes.

Il n’est pas surprenant de retrouver un très grand nombre des jeunes ingénieurs frais émoulus de l’École Nationale de l’Aviation Civile pratiquement obligés d’y partir faire leurs premières armes, avant qu’on ne les retrouve quelques années plus tard occupant les plus hauts postes de responsabilité au sein de l’administration de l’aviation civile en France, d’où les très nombreux témoignages qu’on trouvera au fil des pages de cet excellent ouvrage, complétés par un certain nombre d’articles plus généraux, dus à la plume d’auteurs qui ne sont pas inconnus des habitués de l’Aérobibliothèque, comme Robert Espérou, pour n’en citer qu’un seul. Bien sûr, certains récits peuvent parfois donner l’impression de se recouper, mais l’équipe éditorial a pris le — bon — parti de pas faire de choix et il faut reconnaître que les points de vue ne sont jamais tout à fait les mêmes.
Les indépendances des pays d’Afrique Noire ayant été acquises plus sereinement qu’ailleurs, les efforts de développement mené dans les années 50 vont se poursuivre à travers une coopération efficace conduisant vers une africanisation progressive des services aéronautiques, dont la création de l’ASECNA est une des réussites les plus marquantes, chargée de gérer encore aujourd’hui le trafic aérien au-dessus de ces nombreux nouveaux pays.

À la suite de l’Afrique Noire, l’ouvrage passe en revue les autres régions d’influence française — passée ou présente, même si les témoignages qui s’y rapportent sont moins nombreux, au grand regret des promoteurs de ce livre. Ils ont toutefois corrigé ce déséquilibre par de nombreux articles de synthèse, formant un passionnant ensemble de témoignages inédits sur l’histoire aéronautique récente.
Faut-il citer tous les territoires évoqués : Indochine, Polynésie, Antilles, etc… sans oublier les vestiges de l’histoire qui permettait aux équipages se posant à Berlin de parler en français avec les contrôleurs de l’aérodrome de Tegel jusqu’à la chute du Mur… On relèvera juste au passage la contribution comme toujours précieuse de Vital Ferry, autre habitué de nos recensions.

Comme les autres ouvrages de cette collection, l’accent est donc mis sur la transmission de témoignages, accent qui prend ici un sens particulier pour un corps d’ingénieurs de l’Aviation Civile (nouvelle dénomination prise en 1971) récemment fusionné dans une seule même catégorie au gré de opérations de rationalisation administrative, classe au sein de laquelle leur spécificité aéronautique semble bien moins affirmée. Nous laisserons au lecteur le soin de méditer sur une quelconque coïncidence avec le transfert progressif de nombreuses responsabilités de l’administration française de l’aviation civile à de nouvelles autorités européennes…

Pierre-François Mary


24 x 24 cm, 289 pages, broché



Cet ouvrage fait partie d’une série de volumes publiés par la Mission « Mémoire l’aviation civile » créée en 2004, très souvent avec l’aide d’association d’anciens de l’aviation civile.
L’organisme éditeur n’ayant pas de vocation commerciale, ces ouvrages publiés ne sont pas mis en vente. Pour tous renseignements, s’adresser à La Mission Mémoire l’aviation civile

En bref

DGAC, mission mémoire de l’aviation civile

ISBN 978-2-11-099342-7