Présentation : par le passé, les éditions de l’Officine avaient parfois péché par une mise en page et une impression passables. Là, il faut reconnaître un net progrès. En effet, le papier utilisé est bien meilleur, et les textes mieux présentés, ce qui rend la lecture plus agréable, De plus, les photos sont imprimées en couleur, directement dans le texte, avec un qualité qui, sans être excellente, les rend en tout cas bien plus agréables à regarder. Le format est resté le même, avec une couverture souple à dos carré, rendant le livre aisé à manipuler et à lire.
Texte : l’auteur n’en est pas à son premier essai sur les sujets aéronautiques. Pourtant, à la lecture de celui-ci, il semble évident qu’il connaît très mal ce domaine. Le début de livre s’annonce pourtant fort bien. La présentation des principaux protagonistes et de leurs relations à la fois personnelles et familiales sont clairement décrites, de même que l’histoire régionale de l’industrie de Caudebec-en-Caux. Mais si l’auteur semble à l’aise pour les biographies et l’histoire régionale, tout se gâte dès que l’on aborde l’aviation. La preuve la plus flagrante de ce malaise réside dans la construction des textes : plutôt que de faire un récit de l’histoire en l’illustrant parfois de citations pour souligner certains aspects, c’est le contraire que l’on rencontre. L’auteur aborde tous les aspects aéronautiques exclusivement au travers de longues citations d’articles de l’époque, copiées dans leur intégralité, sans y apporter le moindre complément d’information, pas même contextuel. L’essentiel de l’ouvrage est donc constitué d’une litanie d’extraits de coupures de presse, à peine articulée de petites phrases sibyllines pour les enchaîner. Autre preuve du malaise, les noms d’avions et de constructeurs souvent écorchés, comme « Blackburne » au lieu de « Blackburn », « Marcchi » au lieu de « Macchi », Dornier « Walli » au lieu de « Wal »… Seuls les chapitres où interviennent des personnages sont mieux construits. Encore faut-il faire abstraction de l’agaçante alternance des conjugaisons indécises entre phrases au passé et au présent, qui hachent encore davantage la lecture. Dommage, le sujet est très intéressant et l’auteur a manifestement eu accès à de bien intéressants documents familiaux. Il sait fort bien raconter les aspects historiques lorsqu’ils tombent dans son domaine de connaissance.
Illustrations : le choix des illustrations va de pair avec le texte, essentiellement constitué de photos provenant de la presse, d’une qualité de reproduction qui ne met pas toujours ces avions à l’honneur. Quelques bonnes photos apparaissent néanmoins au hasard de quelques pages, dont les originaux semblent bien meilleurs, mais on atteint là les limites des capacités d’impression de l’éditeur. D’intéressantes annexes accompagnent l’ouvrage, avec des description de certains hydravions (là encore intégralement extraites d’articles contemporains), mais intègre également des reproductions de planches techniques extraites d’une notice du Latham 47, ainsi que la reproduction de certains brevets.
Fond du sujet : hélas, si les articles cités sont bien intéressants, ils ne couvrent que ce que la presse aime couvrir, c’est à dire essentiellement des belles histoires, des grands évènements, et des anecdotes croustillantes. La bibliographie en dit long : l’auteur a eu la chance de retrouver l’article de Jean Liron écrit il y a plus de 40 ans, qui constitue la première bonne synthèse sur le sujet. En revanche, il n’a fait aucun cas des travaux de recherches effectués depuis par d’autres chercheurs, à commencer par les publications de l’ARDHAN. Il n’a pas non plus consulté les archives accessibles auprès des organismes habituels (SHD, CAA, MAE, etc.). Mais le comble est atteint lorsque l’auteur cite Wikipédia comme source « de référence », ce qui en dit hélas bien long sur la faiblesse de son jugement en ce domaine. On ne peut donc que regretter l’absence quasi totale d’informations sur les développements et les essais, ou sur les utilisations opérationnelles des avions. Seuls sont correctement abordés les aspects industriels et certains épisodes, dont la disparition du Latham 47 de Guilbaud et Amundsen, auquel un très long chapitre est consacré. Un livre plein de promesses sur un passionnant sujet, mais qui nécessiterait d’être encore sérieusement complété.
Philippe Ricco
302 pages, 17 x 24 cm, broché
0,820 kg