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Les ailes et le sang

Yves Kervadec, aviateur nantais
et ses frères dans la Grande Guerre
Yves Lainé

Les ailes et le sang est une belle histoire d’amour pour son pays, sa famille et l’aviation, mais aussi la glorieuse tragédie des Kervadec qui payèrent un si lourd tribut à la guerre de 14-18. Car le récit vivant ne laisse aucun doute sur la passion bouillonnante de ces Bretons au service de leur chère France, ici enrôlés chez les zouaves d’Algérie pacifiant le Maroc, là vaillants dans les engagements meurtriers de l’Ourcq (300 rescapés pour 3000 engagés au 4e Zouave), ici encore à Verdun, au terrible Chemin des Dames et son effroyable et inutile bain de sang. Trois frères, Yves, Édouard et André Kervadec, se disputent la vedette héroïque de cette courte et dramatique saga. Elle débute à Nantes en 1911 où leur père est avitailleur maritime et se termine à l’été 1917, près d’Ermenonville, lors du crash mortel du Farman F-50 du dernier survivant, Yves, âgé de 26 ans seulement.

On suit avec intérêt le parcours tumultueux de cette famille nombreuse de huit enfants, bourgeoise et chrétienne, déchirée par la guerre et la passion amoureuse de l’un des membres du clan. Yves, fiancé à Laura, une belle Galloise protestante, mère de sa petite Irène, devient aviateur. Sa vocation naît dans le Rif, après un premier vol d’observateur sur Blériot. Blessé en Artois, il rencontre des pilotes français et allemands à l’hôpital et confirme son choix. À l’école d’aviation de Chartres, où il est lâché le 8 mai 1915, il enchaîne les vols : plus haut, plus vite, plus loin, acrobatie, vrille, navigation. Il est breveté pilote le 29 mai 1915. Ses affectations le mènent à Clermont-en-Argonne, près de Verdun, pour des missions de reconnaissance et de bombardement, puis à Salonique aux côtés des Serbes. De retour en France, il rejoint la base d’essai et de transformation opérationnelle interalliée de Plessis-Belleville et trouve la mort au cours d’un vol de bombardement.

Si le récit du parcours héroïque de ses deux jeunes frères, Edouard et André, fantassin et transmetteur, tous deux morts au champ d’honneur à l’âge de 20 ans, donne une idée de la violence terrestre des batailles, celui du parcours aéronautique original d’Yves décrit la montée en puissance de l’aviation militaire. Le nombre croissant et la puissance des appareils et des armements, le développement des techniques de combat aérien, et la prise progressive d’indépendance de la force aérienne, sont assez fidèlement relatés. La chasse naît à Verdun et avec elle son immense prestige : « la fine fleur de l’aristocratie militaire, haute noblesse précédée de ses hérauts d’armes… » Les As français, Guynemer et Fonck, deviennent des modèles pour tous.

Mais la guerre, ce sont aussi les femmes et les enfants qui attendent à l’arrière le retour du soldat, dans la crainte permanente de le perdre, et parfois l’immense joie des retrouvailles, lors de trop courtes permissions. Ainsi, Yves peut-il serrer dans ses bras sa petite Irène, dont il donnera le nom à tous ses Nieuport, et revoir frères, sœurs, et parents dont l’auteur nous fait partager quelques lettres touchantes. Un cahier de photos donne à tous ces personnages une émouvante réalité ; des cartes éclairent le récit témoignant des souffrances, des sacrifices, et des mentalités de toute une époque forgée d’honneur et de patrie.

Yves Lainé, l’auteur et fils d’Yvonne Kervadec, sœur des trois frères, retrouve au travers de ces lignes touchantes sa propre histoire, avec une immense sensibilité et une rigueur historique présentant la grande guerre sous l’angle aérien. C’est un très beau récit où le lecteur captivé de bout en bout découvrira tous les douloureux secrets de l’admirable famille Kervadec et de sa descendance.

Richard Feeser


278 pages, format 24 x 16 cm, couverture souple
72 photos noir et blanc et illustrations

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En bref

Éditions Cheminements

ISBN 2-84478-496-8

22 €