À une époque où les tirs d’Ariane sont devenus des événements mineurs et où le satellite artificiel est un sujet d’une affligeante banalité, il est sans doute bon de rappeler que dans les années 60 et 70, la France développa sa propre aventure spatiale, à l’ombre des deux « grands », USA et URSS.
Disons-le tout net : ce livre d’allure anodine est une perle. Jean-Louis Moineau, dont on se souvient qu’il est l’auteur d’une biographie de son illustre aïeul, a vécu comme ingénieur d’études ces balbutiements de l’aventure spatiale à la française de l’intérieur, de 1962 à 1970. Pour autant, cet ouvrage ne mérite pas l’appellation de « livre d’ingénieur » : vivant, il ne se limite pas aux seuls éléments de technique.
L’auteur le rappelle à juste titre : en matière d’espace, l’essor rapide de la France puise ses sources dans la volonté du général De Gaulle de doter son pays, outre d’une arme nucléaire, des vecteurs nécessaires à son éventuel usage. Par ailleurs, peut-être est-il bon de rappeler que la très européenne fusée Ariane est une émanation 100% française. Entre les deux ? Toute une histoire vibrante et passionnante que l’auteur nous déroule de façon captivante, faisant remonter cette épopée aux travaux de Jean-Jacques Barré, dans l’immédiat après-guerre. En guise d’introduction, nous avons droit à un rappel des premières expériences chez les deux « grands », USA et URSS. Viennent ensuite les premiers noms remarquables : Véronique, tout d’abord, puis les fameuses « pierres précieuses » Émeraude, Saphir, Diamant…
Certes, la technique n’est pas absente du livre (c’eût été assez peu cohérent), mais comme précisé plus haut, le sujet est abordé sous des aspects multiples, y compris humain, politique, historique, ce qui en fait la richesse. Ajoutons à cela que l’ouvrage est accompagné d’une iconographie pertinente, globalement de bonne qualité.
Ce livre est imprimé sur un beau papier de fort grammage, les nombreuses images (dont une bonne part en couleur) insérées dans la corps du texte. Rien de révolutionnaire, mais un ouvrage bel et bon. Une recension élogieuse étant peu crédible sans une petite remarque, nous regretterons le façonnage par feuillets collés (et non par cahiers) dont on connaît la relative fragilité, ainsi que quelques rares « coquilles » (Mirages avec un « s » au pluriel, cela « pique les yeux » des aéromanes). Mais voilà bien les seuls défauts minimes que l’on trouvera à ce livre qu’il serait dommage de voir ignoré.
Philippe Ballarini
236 pages, 17 x 24 cm, broché
0,666 kg