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Les secrets de l’Aéropostale

Les années Bouilloux-Lafont 1926-1944
Guillemette de Bure

 Coup de cœur 2007 

L’Aéropostale, compagnie aérienne mythique qui, de nos jours encore, demeure présente dans tous les esprits, fut terriblement malmenée. Malmenée en son temps, par la concurrence, par le contexte économique, par les intrigues politiciennes… Malmenée encore pendant plus d’un demi-siècle après sa disparition et celle de son grand artisan, Marcel Bouilloux-Lafont. Le rideau n’est même pas tombé avec la mort misérable de ce dernier en 1944, car après que sa prestigieuse société ait été sacrifiée sur un autel sordide commença la seconde agonie de l’Aéropostale : celle de la falsification historique et de la désinformation. Après le discrédit et la ruine, Marcel Bouilloux-Lafont, qui avait réussi où Pierre-Georges Latécoère avait échoué, connut la pire des morts : celle de l’enfouissement dans les oubliettes de l’Histoire. Marcel Bouilloux-Lafont eut le triste privilège d’être mort trois fois : de la mise à mort de sa société en 1933, de son décès d’homme déchu dans un hôtel de Rio de Janeiro en 1944, et d’une coupable amnésie dont commence juste à se remettre actuellement le pays réputé être le berceau de l’aviation, alors que toute l’Amérique du Sud se souvient.

L’Aéropostale, dont tout le monde connaît le nom, c’était lui. Cette Aéropostale, dont tant d’auteurs se gargarisent, a suscité une impressionnante quantité d’écrits. À de très rares exceptions près, ces auteurs ont souvent ressassé les mêmes omissions, les mêmes approximations, les mêmes fables. Bouilloux-Lafont n’est pas un « héros oublié » de l’histoire de l’aviation : c’est un monument enfoui sous les sables d’une bien étonnante amnésie contre laquelle s’était déjà manifesté Marcel Dassault en 1980.

Guillemette de Bure étant la petite-fille de Marcel Bouilloux-Lafont, on était en droit de craindre un livre où la dévotion familiale prendrait le pas sur l’Histoire. En dépit d’un titre aux accents un tantinet racoleurs, nous sommes en présence d’un ouvrage puissamment documenté, à la rigueur historienne sans faille, permettant de jeter sur l’Aéropostale un œil neuf, bien éloigné de la romance à trois sous.

Les secrets de l’Aéropostale ne se limite pas à la réhabilitation (justifiée) de Marcel Bouilloux-Lafont et de son œuvre : il balaie, documents inédits à l’appui, tout un fatras de légendes. Ajoutons à cela qu’il brosse un portrait sans concession du milieu politique délétère de l’époque, ainsi que de certains aspects peu connus de la scène internationale de l’entre-deux-guerres. À la fois passionnant et hautement édifiant, écrit d’une plume vive et alerte où pointe parfois un fleuret non moucheté, le livre de Guillemette de Bure, sans doute celui d’une vie, était attendu depuis de trop longues années. Il est sans conteste l’ouvrage sans lequel il sera désormais outrecuidant de parler de l’Aéropostale sans l’avoir lu en profondeur.

Ce volume est enrichi de très nombreuses notes regroupées en fin de chapitre, d’annexes judicieuses (dont une chronologie, une impressionnante bibliographie, des index de noms de lieux , de sociétés et de compagnies), et agrémenté d’un cahier de seize pages de photos souvent inédites, la plupart issues de la collection de l’auteur ou des Archives Nationales Argentines.

Vraisemblablement trop peu consensuel pour être un bon candidat à un grand prix de littérature aéronautique, Les secrets de l’Aéropostale mérite sans conteste le « coup de cœur » que lui décerne l’Aérobibliothèque avec un plaisir non feint.

Philippe Ballarini


400 pages, 150 x 240 mm, couverture souple


Coup de cœur de l’Aérobibliothèque 2007
– Préface de Robert Vergnaud, ancien président d’Air Inter

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Éditions Privat

ISBN 978-2-7089-9210-4

Coup de cœur 2007
17,90 €