Alain Bonnefon a fait une belle carrière de chirurgien esthétique. Il a toujours mis l’aisance que lui permettait son métier, les multiples raisons qu’il avait de parcourir le monde et les nombreux contacts que cela lui permettait de nouer, au service de sa passion, l’aviation. Il nous propose un livre de ces souvenirs.
Les premiers chapitres, qui nous montrent un jeune Bonnefon encore étudiant en médecine, commençant une première aventure aéronautique, puis une seconde avec beaucoup de culot, d’impertinence, et un peu d’une inconscience due à sa jeunesse, captiveront le lecteur.
Puis s’installe une routine de la recherche de l’aventure aérienne, à laquelle on commence petit à petit à s’habituer, dès lors que les amis qu’il embarque avec lui n’ont plus à vendre leurs Porsche pour financer les vols. Enfin, les chapitres s’enchaînent, comme un cercle vertueux lui faisant connaître toujours plus de monde dans les milieux médical et aérien, lui offrant de plus en plus d’opportunités de vols dans des décors de cartes postales, sur des machines de plus en plus perfectionnées, comme vu dans un immense kaléidoscope qui donne le tournis.
Comme un pot de mélasse sociale que l’on aurait renversé, l’embourgeoisement progresse (îles paradisiaques, ski nautique, endroits huppés, country-club, ski élitiste, mondanités, entregent, etc.), et lui-même ne semble pas en prendre conscience. Si l’utilisation des avions reste techniquement intéressante, le tout se passe dans un monde qui se met à faire penser à celui d’une série télévisée américaine comme « Nip/tuck » (1).
La perte de repère est caractéristique du chapitre consacré à sa première traversée de l’Atlantique Nord, quand il se félicite de l’avoir réalisée « en petit avion ». S’il peut être fier de cette traversée, qui n’est jamais anodine, comment oublier que le petit avion en question est un bi-turbopropulseur Cessna Conquest pressurisé et dégivré, loin de ce qu’il aurait lui-même appelé un petit avion quelques années plus tôt ?
On retrouve ce glissement de repères page 153 dans cette envolée digne de Jacques Séguela : « En 2003, Ivo est le chirurgien esthétique le plus célèbre, il n’y a pas de femme de plus de 50 ans à Tokyo, New-York, Paris, qui ne connaisse le professeur Ivo Pitanguy. »
Il est difficile de conseiller ou de déconseiller une telle lecture. Cela dépendra de la sensibilité de chacun. Il n’en reste pas moins que ces Tribulations d’un pilote privé à travers le Monde resteront pour leur auteur un joli carnet de souvenirs personnels.
Pour ma part, j’ai bien aimé le tout début de l’ouvrage, quand l’auteur nous raconte comment l’aviation a passionné son propre père.
Et pour le plaisir, je garderai une image, juste pour me représenter quel peut être le point commun entre un chirurgien esthétique et un pilote dans l’exercice se son art, quand Alain Bonnefon nous parle des repères qu’il utilise pour se poser à Courchevel :
« Dent du Villard, 95 kt, puis réduction à 90 kt, et j’obtiens des touchés plus ou moins fermes… »
Jean-Noël Violette
202 pages, 15,3 x 24 cm, couverture souple
0,350 kg
Note :
(1) « Nip/tuck » : Série diffusée entre 2003 et 2010 dans laquelle, deux chirurgiens esthétiques amis et concurrents, Sean McNamara et Christian Troy, confrontent leurs visions de leur métier, de leurs passions (voire addictions) et des valeurs de la vie.
(nip = inciser, tuck = retendre)