Le Mans, dans la Sarthe, n’est pas connu que pour ses rillettes et son circuit automobile. Au point de vue aéronautique, c’est près du circuit des Hunaudières que vint voler en 1908 un des pionniers de l’aviation, Wilbur Wright.
La Sarthoise Isabelle Jaulin, dans son enfance, s’est fait offrir par sa grand-mère un carnet de cartes postales édité localement à l’époque des démonstrations de W.Wright. Elle nous en propose une édition en fac-similé sous le titre Les trois huit de Wilbur Wright, en référence au vol du 08.08.08, premier réalisé par l’Américain en Europe. Pour le passionné d’histoire aéronautique, ces documents sont déjà connus, mais pour l’auteure, cette publication est un livret-passion, dont on comprend qu’il puisse parfois tourner à l’éloge. En effet les photos sont accompagnées de textes dans lesquels elle nous raconte les circonstances de cette présence en Europe, et les vols réalisés.
Dans l’histoire de l’aviation, la notion de “premier aéroplane ayant volé” est impossible à établir avec certitude : premier décollage ou premier saut de puce ? Décollage assisté par catapulte ou non ? Contrôle de la trajectoire ou vol subi ? Sortir ou non de l’effet de sol ? Etc.
Pour ne pas trop verser dans le panégyrique, l’auteure a l’élégance de mentionner les vols des principaux autres pionniers, mais on sent que c’est vers l’Américain que son cœur s’est tourné, rappelons-nous que c’est un album-passion.
Le choix est respectable. Le puriste regrettera toutefois des maladresses dans l’organisation des différents éléments présentés, dans le sous-titre « Carnet de cartes-postales du 1er vol européen au Mans » (1) un peu trompeur, dans l’hétérogénéité des temps de narration (2) ou dans quelques formules (3).
Mais n’oublions pas le cadre général de cette parution. L’éditeur, Eric Jamet, est spécialisé dans l’histoire Sarthoise, et son public est plutôt un lectorat de proximité qu’un aréopage de spécialistes de l’aéronautique. Avec ces précautions, cet ouvrage peut être conseillé au grand public local qui n’a pas forcément accès à de tels documents dans son quotidien. Il l’est moins pour les amateurs d’histoire exigeants qui, n’ayant pas les mêmes valeurs, risqueraient d’être déçus.
Jean-Noël Violette
Notes :
(1) Sous-titre : on pourrait croire qu’il n’y a pas eu de vols en Europe précédemment, mais c’est heureusement contredis par le texte du livret.
(2) Temps de narration, exemple : « Pendant 4 jours et 4 nuits, Wilbur Wright va rester dans son hangar, veillant sur son avion. Retardé par le temps exécrable de ce début d’août, il prit son envol le samedi 8 août 1908 à 18h25, jour de son premier vol en Europe […] Orville Wright a aussi été victime d’un grave accident de vol le 21 septembre 1908 à Fort Myers aux USA, il aura trois fractures à la jambe gauche et son passager décédera d’une fracture du crâne. »
(3) « L’aviation en Europe a pris son véritable envol au Mans », un peu péremptoire.
« …la coupe 1908 d’un célèbre fabriquant de pneumatiques », pourquoi ne pas donner son nom à la coupe Michelin ?
Ou encore cette image anachronique de Clément Ader présenté comme « détrônant les Wright avec leur invention qui restait dépendante du système de catapulte pour pouvoir s’envoler. »
60 pages, 14,8 x 21 cm, 0,090 kg