Il n’est pas nécessaire d’être aérophile pour avoir entendu parler de Sylvain Floirat, ancien ouvrier-charron devenu milliardaire. On retrouve l’homme dans l’histoire de nombre de sociétés comme Hachette, Europe 1, le palace Byblos, etc. Mais si nous accueillons dans l’Aérobibliothèque le livre édité par l’association Hautefort, Notre Patrimoine et proposé par Michel Massénat, c’est que « Monsieur le Président » a dirigé des fleurons du transport aérien, de la construction aéronautique, missilière ou spatiale comme la compagnie Aigle-Azur, Breguet ou Matra.
L’auteur nous prévient : ce n’est pas le livre d’un écrivain mais l’ouvrage d’un « assembleur ».
Effectivement, plus qu’un récit purement chronologique, il s’agit d’une compilation de textes de provenances diverses, extraits d’autres publications, transcriptions de discours, articles Internet, et interview de témoins, le tout alternant avec des narrations de l’assembleur lui-même. Cela présente l’avantage de varier les visions du sujet, mais l’inconvénient de faire répéter ce sujet par une multitude de gens, au risque de lasser le lecteur puisque de cette chanson c’est à peu près le même texte qui revient à chaque fois, on ne fait varier que la musique.
Le risque, également, dans ce genre de biographie, est de vite tourner à l’hagiographie. Ici on y tourne volontiers, et les témoignages dithyrambiques sont nombreux. Mais on en s’en retourne aussi : à la décharge de ce travail de recherche, il faut reconnaître que sont également glissés des extraits de livres et des témoignages un peu moins flatteurs, qui contrebalancent cette impression et nous rappellent que tout être humain peut avoir plusieurs facettes.
L’iconographie est très complète, comme il sied à une personnalité certes volontairement un peu effacée, mais souvent présente dans les média. On peut regretter la faible définition de ces photos, principalement en noir & blanc, et l’absence de crédit pour beaucoup, simplement remplacé par la mention « Photo Internet ».
Pour éviter que le lecteur ne se fatigue de ce système non pas de chronologie, mais de multiples chronologies répétitives, guidons-le un peu. Après avoir lu en début d’ouvrage deux ou trois fois les grandes époques de la vie de Sylvain Floirat, invitons-le à se propulser directement à la page 300, où Michel Massénat nous compte en détail certaines aventures industrielles. Là, sur 10 pages, nous découvrons la richesse de la production des cars Floirat, avec tous les modèles construits d’autocars, autorails et autres véhicules routiers. Puis, jusqu’à la page 319, l’intérêt du passionné d’aviation va se réveiller, avec la saga de la compagnie Aigle Azur. Suivant une douzaine de pages sur Breguet, malheureusement orthographié avec un accent dans la majorité de l’ouvrage à part dans un texte de Pierre Bonte. Ce n’est pas exhaustif car l’histoire de cet avionneur demande des ouvrages plus colossaux, mais il est intéressant de voir l’articulation entre les périodes pré- et post-Floirat. Enfin, jusqu’à la page 357 c’est de Matra dont il s’agit, avec là également ce qui est arrivé avant et après le passage de « Monsieur le Président ». C’est un morceau de choix, écrit par un spécialiste puisque Michel Massénat a été « matracien », comme ingénieur de 1981 à 2000.
Le reste de l’ouvrage se compose de compte-rendus « bruts de démoulage » de réunions publiques et de témoignages variés, de références et d’annexes.
Un petit regret personnel ? En 1946, avant l’aventure Aigle-Azur, Sylvain Floirat fit partie, avec les autocaristes savoyards Montreuil, Roux et Franchiolo, et certainement parce que qu’il les avait fournis en autocars, des promoteurs d’une première société d’aviation, la Compagnie Aérienne des Alpes Françaises (CADAF). J’espérais trouver quelques données là-dessus dans cet ouvrage, mais ce n’est pas le cas. On ne parle pas non plus de la compagnie Air Alpes, qu’il aida à lancer en 1961 aux côtés d’Henri Ziegler, ni de la coupe Sylvain Floirat – Louis Breguet, l’ancêtre de la Coupe Fédérale, dont il fut le mécène pour les vélivoles français à partir de mars 1958 et jusqu’en 1968.
Le livre est fourni avec un DVD, où le lecteur de l’Aérobibliothèque (Aéromédiathèque ?) saura piocher deux sujets, celui sur la compagnie Aigle-Azur et celui sur les avions… « Breguet ».
Sans accent comme nous en avons parlé, mais ce sera compensé par celui, rocailleux à souhait, dont Sylvain Floirat ne s’est jamais départi…
Jean-Noël Violette
438 pages, 21 x 15 cm, couverture souple
0,700 kg
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