Jean-Jacques Petit aborde de façon complète et très documentée la longue carrière du Mystère IVA dans l’armée de l’Air dans le premier tome d’une série consacrée aux Escadres de Défense Aérienne du Territoire.
Qu’il soit Tay ou Verdon selon sa motorisation, à plan fixe horizontal monobloc ou pas, équipé d’un viseur Babaud ou GGS, mais toujours légèrement supersonique en piqué, et piloté par les as de la 12e escadre de chasse à Cambrai, qui en fut la première dotée, de la 2 à Dijon, de la 10 à Creil, de la 5 à Orange, de la 7 à Nancy, du GE 314 ou de la 8, l’auteur raconte la carrière d’un avion de chasse qui n’épargna ni ses pilotes ni ses mécaniciens. Problèmes de train d’atterrissage, d’extinction moteur, de sortie de piste, de vrille mal maîtrisée, de « pompage indien »* tordant la cellule à plus de 10 G, de confusion de commande entre la palette de train et le robinet HP, de glissade sur piste mouillée, d’explosion en vol ou d’éjection en cascade du côté de Séville, rien ne fut épargné à cet appareil aux si belles lignes qui avait été commandé pour remplacer le très calamiteux Mystère II, retiré après moins de deux ans de service.
En feuilletant cet album historique qui s’appuie sur la chronologie des cahiers de marche et d’opérations des unités ainsi que sur de nombreux témoignages, on apprend aussi que l’avion participa à la crise de Suez depuis Chypre, en plus de 400 heures de vol, et qu’il fit aussi plusieurs passages en Algérie et au Maroc. Vendu à l’export, en particulier en Israël et en Inde avec un intérêt marqué par la Suisse, il eut une vie opérationnelle extrêmement riche avant de céder sa place à plus moderne : le Super Mystère B2 à Cambrai et le Mirage IIIC à Dijon.
Pour avoir piloté cet avion à Tours au GE 314 et à Cazaux à l’EC 2/8, j’ai retrouvé avec plaisir, dans ces pages magnifiquement illustrées de belles photos et de nombreux profils couleur, un avion qui marqua véritablement son époque, surtout pour ses qualités de plateforme de tir en air-air et air-sol, servi par deux redoutables canons longs de 30 mm.
Des premiers vols d’essais, qui coûtèrent la vie au regretté Constantin Rozanoff, jusqu’à son retrait du service à la 8e Escadre de Chasse de Cazaux, en 1982, Jean-Jacques Petit nous fait revivre en couleur l’histoire mouvementé d’un chasseur d’après-guerre, très réussi pour son époque, descendant direct des premiers Ouragan de Marcel Dassault, et père d’une longue famille d’appareils civils et militaires plus achevés et plus sûrs, parmi lesquels on peut citer le Mystère XX et le SMB2.
Richard Feeser
48 pages, 21 x 29,7 cm, couverture souple
NDLR : Le tome 2 traite des 7e Escadre, CTB, Patrouille de France, Groupement Écoles 312 et 314 ainsi que les avions « export » (Inde et Israël).
* pompage indien : mise en oscillation en pitch (tangage) entretenue par le pilote et caractéristique de cet appareil. Certains pilotes indiens, particulièrement crispés sur les commandes, se mettaient souvent dans cette position inconfortable qui infligeait une véritable torture à l’ avion et bien sûr au pilote.