Dans une adresse en début d’ouvrage, l’auteur mentionne ce propos d’Ilya Ehrenbourg : « Et la Russie n’oubliera jamais que les Français, pilotes du « Normandie », sont venus chez nous avant Stalingrad. » Belle manière de rappeler que cette unité fut créée avant que le sort des armes ne bascule et que le IIIe Reich ne commence à percevoir le goût amer d’une inéluctable défaite. Il s’agit sans doute d’un détail de l’Histoire, mais aux yeux des Russes d’aujourd’hui, il conserve une importance symbolique non négligeable : on continue d’honorer là-bas le « Normandie-Niémen », et plus particulièrement la mémoire de Maurice de Seynes*
Cette mémoire-là, moins vive en France, un ouvrage sur le Normandie-Niémen est peut-être nécessaire pour la raviver. Ce livre de 104 pages, abondamment illustré, organisé en chapitres courts et concis, paraît tout indiqué pour livrer de façon dense et sans bavardage l’histoire exceptionnelle de ce régiment, y compris et surtout à des lecteurs peu initiés aux arcanes de cet épisode particulier de la Seconde Guerre mondiale.
Ouvrage synthétique, ce volume voit se partager de façon sensiblement égale la surface des pages par un texte soigné et une iconographie d’une grande richesse : entre autres, environ 150 photographies d’époque, sans oublier 4 cartes et 13 profils de qualité signés Thierry Vallet; Si un texte est terminé non quand on ne peut plus rien y ajouter, mais lorsqu’on ne peut rien y retrancher, celui de Jean-Charles Stasi est une réussite. Un livre bien rythmé, (chaque chapitre ne fait que quelques pages largement illustrées et enrichies de hors-texte), aucune lourdeur mais non plus aucune sécheresse.
L’histoire du « Neu-Neu » est très correctement retracée, depuis des prémisses jusqu’au retour de l’unité au Bourget (ou plutôt celui des survivants). Les principaux épisodes sont narrés de façon satisfaisante, entrecoupés de fiches d’une page sur les Yak-1, Yak-9 et Yak-3, mais aussi de présentations de personnages-clés (Tulasne, Pouyade, Delfino… ou d’événements particulièrement marquants. On connaît la propension des éditions Heimdal à une mise en page et une impression soignées ainsi qu’à une iconographie riche. Ce Normandie-Niémen n’échappe pas à la règle : dans les annexes figurent des photographies en couleur d’uniformes et d’objets qui sont autant de pièces de musée.
Jean-Charles Stasi parvient, dans un texte finalement d’une certaine brièveté, à narrer de façon vivante l’essentiel de l’histoire du Normandie-Niémen. Certes, les « moustachus » n’y apprendront pas grand-chose de plus que le contenu des ouvrages que cite l’auteur dans ses sources, mais reconnaissons comme méritoire son évident désir de porter à la connaissance de tous une histoire qui risquerait de s’estomper peu à peu. Un bon moyen de prendre contact avec cette unité emblématique, l’auteur ayant l’élégance de « renvoyer l’ascenseur » à d’autres auteurs, en particulier Yves Donjon.
Philippe Ballarini
* Lors du transfert de Doubrovka à Mikoutani, le 15 juillet 1944, Maurice de Seynes avait emmené avec lui, coincé derrière le siège de son Yak-9, son mécanicien russe Vladimir Bielozoub. Son avion subissant une grave avarie, de Seynes préféra percuter la planète plutôt que de sauter seul en parachute.
104 pages, 21 x 29,7 cm, relié
0,670 kg
Préface du général Jean-Pierre Job
NDLA : L’ouvrage a été, d’une certaine manière, rédigé à la gloire de ceux du Normandie-Niémen. Jean-Charles Stasi évoque néanmoins quelques « choses qui fâchent », notamment des dissensions au sein de l’unité. Il en passe néanmoins pudiquement d’autres sous silence, telles que des évictions pour revendication de victoires. Mais ce détail avait-il bien sa place dans cet ouvrage ?
Avec l’aimable autorisation des © Éditions Heimdal
Avec l’aimable autorisation des © Éditions Heimdal
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