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Panne au-dessus de l’Atlantique

De la prison aux commandes d’un Airbus…
Pierre Cayouette

Le 24 août 2001, Robert Piché, commandant de bord de l’Airbus A330 d’Air Transat assurant le vol Toronto-Lisbonne, est entré dans l’histoire. Victime d’une panne, l’avion a dû se poser sur l’île de Terceira aux Açores, sur l’aérodrome de Lajes à l’issue d’un vol plané d’une vingtaine de minutes. Cet évènement, dans la droite lignée de la tradition des planeurs lourds canadiens inaugurée par le Gimli Glider en 1983 (Boeing 767 d’Air Canada tombé en panne de carburant en vol), n’a fait aucune victime et à l’instar de Sullenberger, quelques années plus tard, Piché est devenu une véritable vedette dans son pays.

Il fallait donc qu’un livre soit publié pour expliquer son parcours professionnel, et le moindre qu’on puisse dire, c’est que ce celui-ci n’est pas banal. Formé au pilotage dans une structure universitaire, Piché se distingue très tôt par son non-conformisme par un goût pour l’aventure qui lui cause quelques tracas tout au long de sa carrière. Après avoir volé au Canada, il trouve du travail aux Antilles mais il est arrêté aux USA après avoir convoyé un avion chargé de drogue. Il passe 16 mois en prison et pense devoir faire une croix sur sa carrière d’aviateur. Mais de rencontres en coups de chance, sans oublier quelques coups durs qui l’entraînent à devenir barman un temps, Piché finit par toucher du doigt son rêve : voler sur un long courrier. Il a alors 43 ans. Cinq années plus tard, devenu commandant de bord, il se retrouve donc au milieu de l’Atlantique, sans kéro…

Si on suit le déroulement de sa carrière de pilote, par ailleurs atypique et particulièrement trépidante, dans ses différents enchaînements, l’auteur s’intéresse surtout à la psychologie de son héros, sa philosophie de vie et ne fait qu’effleurer l’aspect aéronautique et son quotidien concret.

Le vol plané des Açores, titre du livre et argument principal de cette biographie, est évoqué dans le chapitre d’ouverture uniquement du point de vue émotionnel. On n’y retrouve, par exemple, aucune explication technique sur l’origine de l’évènement. Que ceux qui espéraient un précis de sécurité aérienne ou pouvoir comprendre ce qu’il s’est passé dans le cockpit ce jour-là passent leur chemin.

Les déboires judiciaires de Piché et son incarcération sont un peu plus détaillées et éclairent effectivement un personnage qui possède sa part d’ombre, laquelle réapparait après son exploit aux Açores d’ailleurs.

Originellement publié sous le titre Robert Piché aux commandes du destin en 2002 au Québec, cette biographie semble avoir bénéficié d’un chapitre inédit écrit récemment, puisqu’il y est question de la retraite toute proche du commandant de bord Piché et de ses projets de voyages.

Visiblement et sciemment orienté vers le très grand public, ce récit brosse un portrait qui semble juste du commandant de bord Piché, mais il lui manque une tension, un souffle épique, une problématique pour emporter le lecteur. Il pèche également, et logiquement, sur son aspect strictement aéronautique. C’est une lecture plutôt agréable, où à chaque expression purement québécoise on entend chanter l’accent de Montréal, mais ça ne suffit pas pour compenser son propos trop superficiel typique des « livres d’actualité » commandés en urgence pour « surfer » sur les évènements du moment.

Frédéric Marsaly


200 pages, 15,3 x 24 cm, broché
0,347 kg

Ouvrages édités par
En bref

JPO Éditions

ISBN 978-2-37301-046-6

24,35 €