Ce petit ouvrage en format poche se lit rapidement et ne devrait vous prendre qu’une journée. Ce qui caractérise ce livre de souvenirs d’un pilote militaire par rapport aux autres publications similaires, c’est que Joël Lebrun, qu’il n’en prenne pas ombrage, est pour ainsi dire un pilote « ordinaire ». Mais la vie d’un pilote de combat est-elle ordinaire ? Les autobiographies publiées concernent en grande majorité des aviateurs qui ont atteint les plus hautes fonctions du commandement militaire, obtenu des affectations prestigieuses (par exemple la Patrouille de France), accompli des vols de guerre ou parachevé leur carrière dans l’espace. Ici, Joël Lebrun raconte avec simplicité les 21 années passées dans l’armée de l’Air française.
Né en 1957, il commence sa carrière par Aulnat en février 1976, à une époque où il était encore possible d’être sous-officier et pilote. Suivront le Groupement École 315 à Cognac, puis l’École de chasse de Tours pour finir au 2/8 à Cazaux, progression linéaire qui le verra passer du CAP 10 au Fouga Magister, puis au T-33 et enfin sur Mystère IVA. Affecté au 1/11 Roussillon, escadron qu’on sent cher à son cœur, le « Grand 1/11 » comme il l’écrit toujours, il fait sa transformation sur Jaguar au 2/7 Argonne à Saint-Dizier avant d’arriver à Toul en 1979. Cinq années où il enchaîne les qualifications. Un interlude de deux années comme instructeur sur Alphajet le voit revenir au Roussillon. Il a alors intégré la filière ORSA*. Un peu au culot, il obtient un poste d’officier d’échanges avec la Royal Air Force, sur Hawk, à la base de Chivenor. Après trois ans outre-Manche, à la croisée des chemins (rester, quitter l’armée de l’Air ?), il demande à passer sur ravitailleur en vol. Ses six dernières années sous l’uniforme le voient évoluer sur KC-135FR. Civil, il devient instructeur sur simulateur de vol, fonction qu’il avait commencé à exercer sur les Boeing à Istres.
Joël Lebrun n’entre pas dans les détails poussés quand il raconte sa carrière ou certains vols. Bien au contraire, il s’efforce d’écrire et de décrire simplement, pour que tout un chacun puisse comprendre son quotidien de pilote. Sans langue de bois, mais sans animosité non plus quand il évoque son stage d’officier (page 61). Tout au plus donne-t-il de temps en temps le numéro d’un avion, à l’occasion d’un lâcher, ou d’un dernier vol, de même que ses promotions et qualifications (pages 111-112). Suivent alors 16 pages d’illustrations en noir & blanc et en couleur. Vu le petit format de l’ouvrage, quand les photos sont publiées par deux, on regrette qu’elles ne soient pas plus grandes. Particulièrement la reproduction du tableau de la page 127.
Au-delà de la vie du pilote, il parle également de sa vie personnelle, de son mariage, de sa famille, mais sans s’appesantir. Il fait comprendre à quel point les mutations d’une base à une autre impactent la vie de famille, tout comme les contingences opérationnelles.
Le livre est globalement très agréable à lire ; on peut juste regretter quelques fautes de français qui ont échappé à la relecture, et l’anonymat de certains personnels militaires évoqués. Cette autobiographie simple est un contrepoint intéressant par rapport à celles évoquées plus haut, souvent plus « élitistes ». Une autre vision des choses qu’il est utile de connaître.
Jocelyn Leclercq
* ORSA : Officier de Réserve en Situation d’Activité
168 pages, 12 x 19 cm, broché
0,181 kg