Si le contenu de ce livre est forcément intéressant puisque traitant d’un sujet passionnant, le célébrissime Piper Cub, il convient néanmoins de revenir sur son résumé tel que présenté en quatrième de couverture : « Ancien technicien de l’industrie aérospatiale, journaliste aéronautique et pilote de Piper Cub, André Bréand offre avec cette étude complète et détaillée la première monographie sur le sujet en langue française, qui se lit aussi agréablement qu’un roman. » On la lit certes comme une monographie, mais certainement pas comme un roman. Car ce qui est tolérable ici pour une étude technique au niveau de la syntaxe, de la lourdeur de certaines phrases et de la maladresse dans le choix de quelques expressions, bref ce qui rend par moments cette lecture moins agréable qu’elle ne promettait de l’être, serait difficilement imaginable s’il s’agissait vraiment d’un roman. Sans trop s’y attarder, on regrette un manque d’homogénéité dans le choix des temps de narration, sans que cela semble avoir été voulu pour donner régulièrement des effets de « flashback », on s’étonne de certaines formules à l’emporte-pièce et souvent dithyrambiques, on est gêné par des analyses un peu anachroniques ou par l’inversion chronologique de certains événements sur une trame cependant historique. Si on le pardonne volontiers à l’ancien technicien de l’industrie aérospatiale, c’est déjà plus surprenant pour un journaliste aéronautique.
En ce qui concerne l’iconographie, elle est globalement intéressante mais on doit peut-être également moduler la postface de la quatrième de couverture : « Illustré de nombreuses photographies et plans trois vues, ce livre répond également aux attentes des maquettistes ». Les photos sont effectivement nombreuses, en couleur comme en noir et blanc. Il est dommage cependant que la source de beaucoup d’entres-elles ne soit pas mentionnée (« DR ») et que la date ne soit pas toujours précisée, ceci empêchant le lecteur d’être sûr qu’il s’agit d’une photo ancienne ou d’une plus récente d’un avion préservé.
Des plans 3-vues et des profils viennent également égayer cet ouvrage. Si les maquettistes sont effectivement la principale cible visée, ils risquent de regretter la présentation de ces illustrations. On trouve d’une part des plans 3-vues dont la taille semble simplement avoir été choisie pour assurer une mise en pleine page, et d’autres plus petits en complément. Si des références de dimensions sont parfois figurées, l’échelle choisie n’est jamais précisée.
Cela donne une joyeuse pagaille si l’on s’amuse à calculer ces échelles à partir de l’envergure des appareils (à la précision de mon calcul près) :
– Plans 3-vues N&B des B-2 Chummy (dessin simplifié), Taylor J-2 et Piper J-3 au 1/44e
– Profil J-3 au 1/50e
– Plan 3-vues couleur L-4H au 1/74e
– J-5A au 1/103e
– Plan 3-vues J-4 Cub Coupe au 1/45e
– L-4X au 1/100e
– Plan 3-vues Pa 11 au 1/44e
– Plan 3-vues Pa 15 Vagabond et Pa 17 au 1/36e
– Plan 3-vues Pa 18-135 au 1/45e
– et pour finir deux plans de L-21, d’origine Piper, très intéressants mais malheureusement quasi-illisibles car au 1/146e
Si au niveau des textes l’abondance des versions et dérivés extrapolés du J-3 donne légèrement le tournis car présentées un peu en ordre dispersé, les références aux nombreuses publications, pour la plupart anglo-saxonnes, déjà consacrées au Cub sont clairement citées.
Un « plus » indéniable réside dans l’explication des particularités « franco-françaises », que ce soit l’aberrante immatriculation de L-18 sous l’appellation Pa-19 au registre F (merci au passage, j’ai enfin compris un truc qui me chiffonnait) ou l’utilisation des Super-Cub par l’ALAT en Algérie. Un petit regret personnel ? Si l’utilisation en ‘bonne à tout faire’ du Super-Cub en travail aérien est bien citée, j’aurais aimé un petit « focus » sur les versions remorqueur de planeur, certes peu utilisées en France mais bien présentes dans d’autres pays.
Le livre se poursuit avec des chapitres sortant un peu de l’ordinaire pour ce type de monographie, et ce à notre grand plaisir : description de l’optimisation des choix techniques dans la conception de ces machines (avec un écorché d’aile d’origine Piper, magnifique bien que reproduit à bien trop grande échelle), guide « Acheter ou rénover, ce qu’il faut savoir », avec un tour de la structure en photos et en explications bien utiles.
L’ouvrage se termine avec de plus habituels chapitres consacrés aux versions extrapolées (et le J-3 a été très prolifique en clones !) et aux fiches techniques présentant les principales versions de la famille Cub.
En résumé, nous trouvons dans cet ouvrage du bien pour ce qui est du fond, et de l’améliorable quant à la forme. Ce n’est pas un roman, mais cela tombe bien, car ce n’est pas ce que nous recherchons en acquérant ce type d’ouvrage. Pour la monographie, c’est ce que nous voulons : un ouvrage de synthèse très correct sur cet appareil qui nous a fait rêver, le Piper « Club »…
Jean-Noël Violette
150 pages, 21 x 30 cm