Voulez-vous passer un bon moment ?
Ne parlons pas de la longue traque d’une épave d’avion à remettre en état et des années de galère que va prendre la restauration elle-même, à faire prendre celui qui la mène pour un moine bénédictin masochiste.
Non, simplement, le temps d’une excellente lecture, celle de cet ouvrage écrit par Nigel Stevens et édité par la Fédération RSA, l’ancien « Réseau des Sports de l’Air » cher aux constructeurs amateurs.
Nigel Stevens est un ingénieur anglais, vivant en France et ayant réalisé lui-même la restauration d’un De Havilland Canada Chipmunk. Faute de trouver la documentation qu’il lui fallait pour cela, il a du mener de multiples recherches, et a décidé de les partager par le biais d’articles dans la revue « Les cahiers du RSA ». Cet ouvrage est un recueil de ces articles. Mais il n’est pas que cela.
C’est en fait une espèce d’encyclopédie technologique, au sens traditionnel et noble de l’étude des techniques, et non pas dans une version moderne galvaudée où l’on a trop vite fait de remplacer le mot « techniques » par « technologies ». Mais ici rien n’est rébarbatif, tout est agréablement présenté, et émaillé d’anecdotes, de plaisanteries très britanniques et de gentilles moqueries quand la situation ubuesque le mérite, comme la disparité des normes dans chaque pays. Le tout, dans un français impeccable, laisse percer par moment une pointe d’accent anglais au détour d’un mot ou d’une expression.
Chaque chapitre se termine par un résumé de ce qu’il faut retenir, et par quelques références importantes. Les raisonnements sont implacables, et le ton vraiment très sympathique. Le tout est illustré de photos, de tableaux, de plans techniques ou de publicités anciennes.
Dans cette somme de quasi-perfection relevons — « histoire de dire » — une petite perle page 158 : « Les trous doivent être comblés avec un mélange de poussière, de liège et de vernis. » De l’importance d’une virgule…
Il n’est donc pas nécessaire d’avoir une restauration en vue pour apprécier ce livre ; il suffit de vouloir enrichir sa culture technique en s’amusant. Vous découvrirez avec ravissement ce que sont la fibre rouge, le butadiène, la phénolique, les bandes Jaconas, le monel, le Tungum, le régule, etc. et l’histoire des rivets Chobert ou la genèse des Serflex/Flexinox, du duralumin ou de l’Alclad…
Le seul reproche que l’on puisse faire à ce livre ? C’est de n’être que le premier tome d’un travail que l’on espère voir se poursuivre de manière aussi remarquable. Si tous les requis préliminaires sont abordés, la partie « restauration » à proprement parler n’aborde ici que les entoilages et les verrières, et l’on est impatient de lire la suite. En attendant, ce premier tome est un ouvrage à recommander sans réserve comme apéritif, vous aurez plaisir à vous en restaurer en attendant le plat principal…
Jean-Noël Violette
192 pages, 21 x 29,7 cm, couverture souple
0,777 kg