Royan, à l’embouchure de la Gironde, connut en 1945 le triste privilège de faire partie de ces « poches de l’Atlantique », réduits fortifiés dans lesquels une centaine de milliers de combattants allemands avaient pour mission de combattre jusqu’au dernier. Pour peu menaçantes qu’elles aient été, ces « poches » n’étaient pas que de simples épines symboliques plantées dans le pied des Alliés : verrouillant les ports, elles gênaient l’approvisionnement des troupes. Il était donc nécessaire de les réduire.
La ville de Royan fut le théâtre d’une tragédie qui suscite encore de nos jours d’âpres débats : alors que la ville n’était pas encore complètement évacuée, les Lancaster du Bomber Command y déversèrent de nuit plus de 2500 tonnes de bombes, pour un effet quasi nul sur les installations militaires et les troupes allemandes, mais avec un très lourd bilan sur la population civile et la ville détruite à 80%.
Christian Genêt et Bernard Ballanger ne sont pas tombés dans le piège d’un ouvrage stérile exhalant d’inutiles rancœurs. À la lumière du travail rigoureux des auteurs apparaissent très vite les confusions, les interprétations hasardeuses et les malentendus qui menèrent à l’anéantissement de la ville qui n’était pas totalement évacuée.
Largement illustré de documents d’époque, de cartes et de plans, l’ouvrage est une indéniable réussite. De la création de la forteresse de Royan au dénouement du drame, tous les mécanismes de cette tragédie qui marquera profondément la région sont méticuleusement exposés, sans parti-pris, à l’aide de pièces d’archives, rapports d’enquête, correspondances… Si de nombreux témoignages sont utilisés, c’est avec la circonspection dûe à leur incontournable partialité. Ne portant ni accusation ni jugement, cet ouvrage est un modèle d’ouvrage historique rigoureux laissant néanmoins une place importante à la dimension du drame humain.
Philippe Ballarini
164 pages, 21,5 x 28,5 cm, couverture rigide.