Dès que l’on parle « renaissance de l’aéronautique militaire française », on a tendance à penser bien (trop) vite au Mirage III, oubliant un peu le rôle qui fut joué par d’autres appareils, comme par exemple le Mystère IV ou le Vautour.
Le biréacteur à aile en flèche de la SNCASO, conçu au tout début des années cinquante, marqua son époque de son empreinte : il fut opérationnel dans l’armée de l’Air jusqu’à la fin des années soixante-dix. Il répondait à des préoccupations d’économies budgétaires, puisque d’emblée il fut conçu sous trois variantes différentes : appareil d’attaque au sol, bombardier et chasseur tous temps. Apparu à une époque de pleine accélération des technologies, le SO 4050 Vautour, sous ses différentes versions, participa à bien des expérimentations et, de par sa conception, accomplit une impressionnante variété de missions. Il fut par exemple le premier appareil à expérimenter en France un ravitaillement en vol (il remplira également le rôle de « nounou »). Il a également servi comme « chasse-poussières » lors des essais nucléaires, de même qu’il fut, dans sa version B « Chipiron »*, équipé pour la guerre électronique. On notera que les appareils vendus à Israël furent utilisés pendant la Guerre des Six jours et celle du Kippour.
On le subodore : cet appareil à l’allure pataude et désuète dispose de bien des ressources pour l’aérophile curieux, que ce soit pour ses trois variantes, la variété de ses missions ou celle de ses armements ou équipements.
Alain Crosnier, à qui l’on devait un Vautour chez Lela Presse (épuisé depuis quelques années), était singulièrement bien placé pour ce numéro 11 de la collection « Les matériels de l’armée de l’Air et de l’Aéronavale » qui régalera autant l’amateur d’histoire des ailes françaises, le nostalgique des avions française des années cinquante que le maquettiste à la recherche de documentation solide. Le sommaire est des plus classiques : après les chapitres menant de la genèse à la production en série, au CEV (avec un V2N porteur d’une superbe livrée tricolore qui devrait inspirer un maquettiste) et au-dessus du Sahara, on passe aux Vautour dans ses différentes unités.
Le texte (robuste) d’Alain Crosnier est soutenu par une abondante iconographie, tantôt en noir et blanc, tantôt en couleur, en tout cas très variée, à laquelle viennent s’ajouter 24 profils de Nicolas Gohin répartis sur 6 pages. S’il ne rompt pas avec la formule classique de la collection, ce livret développe l’aspect historique autant que la place le lui permet, l’iconographie (superbe) prenant une place non négligeable.
Ce SO 4050 Vautour ne prétend bien évidement pas égaler une épaisse monographie ; mais à 16 € l’exemplaire, c’est néanmoins ce qu’on peut appeler « une bonne affaire ». Si certains livres font parfois l’effet de beaux emballages autour d’un contenu indigent, ce n’est pas le cas dans cette collection où visiblement on ne se moque pas du client : le ramage se rapporte au plumage.
Philippe Ballarini
64 pages, 21 x 25 cm, 150 photos, 24 profils
– La collection « Les matériels de l’armée de l’Air et de l’Aéronavale »
* chipiron : vocable aquitain pour désigner l’encornet (petit calmar).