Si plusieurs livres ont été publiés en France sur le « miracle de l’Hudson », l’ouvrage signé par le principal protagoniste de cette affaire, le commandant de bord Chesley B. Sullenberger, dit « Sully », était resté inédit en France. Ce livre, Highest Duty, avait été publié en langue anglaise seulement quelques mois après l’accident qui a rendu son auteur mondialement célèbre. Adapté au cinéma par Clint Eastwood avec Tom Hanks dans le rôle-titre, Sully est sorti en salle le 30 novembre 2016 en France et a été salué comme un film sobre, sérieux et juste.
C’était l’occasion ou jamais de sortir enfin la version française de l’ouvrage, abandonnant au passage son titre original pour reprendre celui, sans doute plus vendeur, du film.
Dans cette autobiographie, Sullenberger revient longuement sur ses parcours d’homme et d’aviateur. Breveté pilote très jeune dans son Texas natal, il n’avait que 16 ans, il rejoint ensuite l’US Air Force Academy à Colorado Springs. Une fois diplômé, il suit un cursus de formation au pilotage qui l’amène au cockpit d’un F-4 Phantom. Convaincu que tenter de faire carrière dans l’USAF l’entraînerait très rapidement à ne plus voler, il parvient à rejoindre une compagnie aérienne, la PSA, à la fin des années 70 et se retrouve basé en Californie où il s’installe. Il parvient très vite, en moins de 10 ans, au poste de commandant de bord mais sa compagnie, de rachat en fusion, est intégrée à US Airways. Sullenberger se retrouve donc affecté à Charlotte en Caroline du Nord, ce qui n’est pas sans conséquence pour sa famille restée dans la région de San Francisco.
Au cours de ces années, il a vu se dégrader ses conditions de travail, sa rémunération, sa future pension de retraite et au moment de l’accident, la famille Sullenberger est confrontée à quelques inquiétudes financières. Pourtant, le moment venu, le commandant de bord et son équipage ont réussi un exploit qui a fait date dans l’histoire de l’aviation. Dernière partie du livre, l’accident et ses conséquences directes pour le héros, son équipage et sa famille, constituent en quelque sorte le point d’orgue d’un parcours jusque-là sans histoire.
C’est l’occasion surtout de constater que l’adaptation cinématographique de Clint Eastwood de ce livre est forcément partielle, mais vraiment très fidèle, puisque c’est surtout la période du 14 janvier 2009 et ses conséquences qui a principalement intéressé le réalisateur même si on retrouve quelques flash-back essentiels pour bien comprendre le parcours du pilote. La principale différence entre le livre et le film est la perception du rôle de la commission d’enquête considérée comme une étape indispensable, un peu pénible mais effectuée avec bienveillance dans le livre mais pouvant être interprétée comme un tribunal à charge dans le film afin de lui donner une tournure un peu plus dramatique.
Cette biographie révèle un Sullenberger professionnel jusqu’au bout des ongles, un homme calme, réfléchi, soucieux des autres et au parcours intéressant. Elle laisse une place importante à sa philosophie de vie bien plus qu’à ses exploits de pilote. La traduction de Laure Joanin est excellente, sauf en ce qui concerne les subtilités du langage aéronautique, mais comme l’ouvrage est assez peu technique, la plupart du temps, cela ne constitue pas une grande gêne même si c’était pourtant facilement évitable.
Portrait d’un pilote devenu médiatique un peu contre son gré, Sully est un excellent complément, voire un substitut, du film que Clint Eastwood en a tiré. Sans être une biographie bouleversante et extraordinaire, c’est un éclairage important sur l’un des plus incroyables faits divers aéronautiques de l’histoire.
Frédéric Marsaly
352 pages, 13,8 x 22,5 cm, broché
0,402 kg
– Avec la collaboration de Jeffrey Zaslow
– Traduit de l’anglais (États-Unis) par Laure Joani
En complément de cette recension, nous vous proposons deux analyses du film Sully par des aérobibliothécaires :