En 1932, Géo Ham (Georges Hamel selon l’état civil) n’est plus un gamin insouciant ; il est même devenu un personnage réputé dont les dessins et peintures figurent volontiers dans le célèbre magazine L’Illustration. Surnommé en son temps « le peintre de la vitesse », Géo Ham nous a laissé de superbes images de la grande époque des Bugatti, Delahaye, Talbot… Cela aurait pu largement lui suffire si un démon (bien inspiré par la « magie » de l’Aéropostale) ne lui avait insufflé en 1932 une idée saugrenue : faire le voyage de Toulouse à Santiago du Chili. La (bien nommée) compagnie Aéropostale n’étant pas vouée au transport de passagers, c’est enregistré en tant que… sac de courrier que Géo Ham effectua ce périple de huit jours.
L’association « Les amis de Géo Ham » s’ingénie à perpétuer le souvenir de l’intrépide reporter-aquarelliste, de ses peintures et dessins comme de ses articles, essentiellement par le biais de carnets à la présentation très soignée. Ainsi, plutôt que de partir en quête d’exemplaires usagés du numéro spécial de L’Illustration de 1932, vous propose-t-elle de retrouver le texte de Géo Ham, à la virgule près, et l’ensemble des illustrations… dans toute leur fraîcheur. Au-delà de l’aspect « beau livre » et du soin manifeste apporté à la réalisation de ce carnet, la dimension documentaire est à prendre en considération. Géo Ham se devait de rendre compte aux lecteurs de L’Illustration, et il le faisait dans une langue simple mais élégante, ni pompeuse ni faussement populaire, racontant simplement son périple, recherchant davantage la véracité que la gloriole qu’il aurait pu tirer de son aventureux voyage. Un texte vivant, évocateur et coloré comme ses aquarelles.
Parlons-en, de ces aquarelles ! Bien plus significatives que les photographies qui, à l’époque, étaient le plus souvent figées. Ses illustrations sont à la fois de petits chefs-d’œuvre artistiques et de puissants témoignages. Quoi de plus parlant que ce tableau représentant le guerrier chleuh garant de la sécurité de l’équipage, à l’arrière du Laté 26, en plein vent, au-dessus de la mer de nuages, sous la pleine lune, tapi parmi un amoncellement d’objets hétéroclites où se mêlent sacs postaux, bidons et casque colonial…
Convenons-en : ce fascicule n’est pas particulièrement bon marché. Précisons toutefois qu’il est édité en petite quantité sur un papier de très fort grammage et que l’impression comme le façonnage en sont excellents. De la même manière, le nombre annoncé de 46 pages est à revoir à la hausse, car nombre d’entre elles se déploient dans un format double. Ajoutons que l’article original se voit complété par un reportage sur le naufrage de l’aviso « Aéropostale II ». En tout cas, un bien bel hommage à Géo Ham.
Philippe Ballarini
46 pages, 18,5 x 18,5 cm, reliure par anneaux métalliques
© Les amis de Géo Ham